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Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.

Envol pour Fès mardi après midi. La rencontre prévue entre représentants de la production de fruits et légumes du Maroc et de la France avait bien lieu. Elle était devenue plus qu’incertaine quelques jours plus tôt après la décision européenne de modifier le système de valorisation des importations  à l’entrée dans l’UE. De ce côté ci de l’Atlas, c’est aux français que l’on attribuait la paternité de la remise en cause du système antérieur, bien plus favorable.

Le temps de déposer les valises à l’hôtel, nous nous sommes retrouvés face à nos hôtes dans cet autre Sofitel célèbre qu’est le Palais Jamai. Le lieu est mythique. Un trésor d’architecture arabo-mauresque qui domine la Médina au cœur de la ville impériale de Fès, cité de festival, capitale spirituelle et culturelle du Maroc.

Les présentations faites, de chaque côté de la table chacun s’est employé à vanter les mérites du dialogue et des échanges entre acteurs d’une même production tournés vers un même marché. L’un raconte comment marocains et espagnols ont déjà réussi à surmonter leurs violents différents par le dialogue et comment les échanges entre eux sont devenus profitables. Nous sommes invités à nous engager dans la même voie.

Le fruit de la discorde entre nous c’est la tomate. Le différentiel de coûts de production est tel que les producteurs français sont vent debout contre les importations marocaines à bas prix. Ce sont des résistants. Qui pourrait leur en vouloir de se battre pour produire en France ? Ils n’ont pas voulu participer au voyage. Surtout ne pas prêter le flanc à une nouvelle offensive dans un rapport de force par trop inégal.

La réalité pourtant s’impose. Un quota en volume est accordé à la production marocaine sur l’Europe à une période de creux pour la production française. La difficulté c’est le tuilage. Le début et la fin de la production qui se télescopent souvent sévèrement. Le climat instable de part et d’autre de la méditerranée se charge de surprendre chaque année et de mettre la zizanie.

Alors, quoi faire dès lors que cette situation fait des dégâts sur les deux continents ? La proposition marocaine, c’est que les producteurs doivent se parler pour réussir au mieux les débuts et les fins de campagne chaque année en échangeant sur les prévisions de récolte. Pour ajuster l’offre à la demande et éviter la chute des cours.

Les arguments développés par nos hôtes ne manquent pas de sel. La balance commerciale entre l’Europe et le Maroc est toujours très déficitaire pour ce dernier. Les intrants pour la production des tomates sont importés en quasi-totalité d’Europe, à l’exception de la main d’œuvre et du soleil. Et puis cette remarque au président de Légumes de France pour lui dire que s’il baptisait son syndicat Légumes français, une grande partie de la production marocaine en ferait partie. Et encore ce rappel de la discipline à laquelle ils se sont astreints de ne pas être présents sur le marché le reste de l’année où ils pourraient être compétitifs malgré les droits d’entrée plus élevés.

Pour ce qui concerne la pomme, les enjeux immédiats sont bien moindres. L’UE dispose d’un quota d’expédition vers le royaume de 4000 tonnes hors droits entre mars et mai. La France n’expédie que 400 tonnes sur ce quota. En dehors de cette période les droits de douanes ad valorem d’élèvent à 40 %.

J’ai rappelé ma présence au festival de la pomme de Midelt à l’automne 2012 à l’invitation de la province de Meknès Tafilelt. Réaffirmé mes encouragements à la réussite du plan Maroc vert pour le développement de la production de pomme qui atteint aujourd’hui 440 000 tonnes, mais sans satisfaire encore tous les besoins de la population. D’autant plus que seulement 20 % de la récolte est stockée pour être mise en marché jusqu’au printemps suivant.

Je me suis quand même risqué à proposer la suppression des droits de douane à l’importation pour compléter chaque année avec des pommes françaises la gamme variétale de pommes offerte aux consommateurs marocains.

La réponse combative m’est venue de Nezha, l’arboricultrice de référence du Maroc : « Vous produisez plus de 60 tonnes à l’hectare en France alors que notre rendement moyen ne dépasse pas 17 tonnes. Comment pourrions- nous tenir la concurrence face à vous sans droits de douane ? »  Cette remarque évidemment pertinente a quand même permis de légitimer la démarche équivalente des producteurs français qui considèrent ne pas être en mesure de faire face à certaines concurrence.

Promesse faite de poursuivre les contacts entre producteurs et pouvoirs publics nationaux, c’est autour d’une bonne table, dans un décor féerique, que les échanges se sont poursuivis.

J’ai ainsi pu dépasser l’irritation suscitée par ma demande de libre échange et écouter longuement Nezha m’expliquer l’état des lieux précis de la production locale de pommes. Le plus surprenant étant sans doute les difficultés de recrutement de main d’œuvre pour assurer les travaux saisonniers au verger, les longues négociations syndicales nécessaires pour éviter les grèves pendant la récolte.

Je retiens de nos échanges la qualité de nos interlocuteurs, la force de leurs convictions, la consistance de leurs arguments, mais surtout leur sens de l’hospitalité.

Le lendemain nous avons assisté aux assises de l’agriculture à Meknès qui précèdent la grande foire aux équipements. L’occasion d’entendre le ministre de l’agriculture du Maroc Aziz Akhannouch, le président de la Guinée, Alpha Condé, et le président du Mali, Ibrahim Boubakar Keita, s’exprimer sur leurs pays respectifs et sur les enjeux de l’agriculture familiale. Pour les plus curieux d’entre vous j’ai trouvé un lien vers une vidéo intégrale des assises. (à voir plus bas)

Conduits par le président d’Interfel Bruno Dupont, "qu’il soit glorifié lui et toutes ses familles", nous avons rejoint le ministre de l’agriculture français, Stéphane Le Foll, dans l’après midi sous la tente à l’agro pôle de l’olivier. Nouveaux échanges particulièrement riches entre nos deux pays et les acteurs de l’olive. Xavier Beulin s’exprimait en tant que président de Sofiprotéol, un acteur économique important au Maroc.  

Retour le soir à Fès où un des vice-présidents de l’interprofession qui co-présidait la veille la rencontre invitait toute la délégation à diner dans la demeure de ses parents. Lui-même habitant Agadir comme il se doit dans la tomate. Nouveaux échanges passionnants avant une courte nuit et un retour à Paris pour une autre rencontre tout aussi captivante avec les équipes d’Agrofresh et nombre de participants de la filière que j’ai eu plaisir à voir dans un très beau  cadre en forêt de Chantilly. De nouvelles perspectives pour la production de fruits se font jour, permises par des innovations scientifiques très surprenantes. Mais ce sera pour un prochain épisode mes très chers lecteurs. 

 

 

Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
Un rameau d’olivier et une pomme dans la main.
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À propos

Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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