24 Mai 2014
Même avec un tronçon de RN10 à deux voies et tous ces foutus embouteillages du côté de Sainte Eulalie, Reignac est encore bien plus près de Bordeaux que de Nantes ou de Limoges. Dès lors, pas vraiment besoin de faire un référendum pour demander aux heureux habitants de ma commune quelle capitale régionale ils revendiquent si Poitiers n’est plus la leur.
Avec la perspective de la diminution du nombre des régions nous avons enfin un sujet stratégique qui fait la quasi unanimité dans notre département. Politiques, acteurs économiques et population optent presque tous pour une fusion de la Charente avec l’Aquitaine. Peu importent les conséquences géopolitiques immédiates et lointaines de notre divorce d’avec Ségolène Royal et le chabichou. Nous n’écoutons que notre courage. Non mais.
On a beau s’en défendre, rien de tel qu’un débat sur l’identité et les frontières, même régionales, pour réveiller le peuple, les élus et les irrédentismes de clocher. Au diable le politiquement correct. Si « le nationalisme c’est la guerre », comme l’avait dit Mitterrand devant le Bundestag, pour sûr que le chauvinisme c’est la guéguerre.
François Bayrou annonce fièrement qu’il ne veut pas de nous parce que nous n’avons pas la même culture et que nous ne parlons pas la même langue, préférant lorgner vers la région Midi Pyrénées. Alain Rousset s’inquiète cupidement du prix à payer si nous rejoignons l’Aquitaine. Ségolène Royal veut attacher notre destin à sa personne et appelle à une fusion absorption avec les pays de Loire. Jean Pierre Raffarin bande son arc Atlantique depuis Châtelaillon plage et décoche des flèches bien salées. Dominique Bussereau et Michel Boutant électrifient et court-circuitent la voie Royal. Ils sont prêts à croiser le chemin de fer pour que la Charente se jette enfin dans l’Adour Garonne. Et pour finir Jacky menace ce matin chez Kiki de hisser le drapeau de l’Angoumois sur le fronton de la mairie de Ladiville.
Ça délibère et ça pétitionne de toute part. Bref, c’est la mobilisation générale. Gauche et droite, nous sommes tous unis dans l’adversité. C’est beau, c’est grand, c’est généreux.
Pas vraiment facile dans ce contexte mes chers lecteurs de lever le doigt pour demander aux uns et aux autres en quoi de nouvelles frontières vont stimuler la croissance et remettre à flots les finances publiques. Le sujet est bien trop terre à terre pour intéresser les belles âmes chevaleresques qui nous gouvernent. S’agiter, brasser du vent et se regarder le petit périmètre, tout cela est tellement plus excitant.
Et pourtant, les limites régionales ne me semblent pas être le problème le plus urgent à résoudre. La révolution des frontières, pour spectaculaire qu’elle puisse paraitre n’est pour l’instant qu’une banale révolution de palais. La vraie révolution consisterait plutôt à simplifier et à rendre efficiente l’organisation de l’action publique, depuis la commune jusqu’à l’Europe. Le salut du pays passe par là. Nous n’en ferons pas l’économie. Mais c’est encore remis à plus tard et toute diversion pour éviter ce travail exigeant est toujours le bienvenu.
Parce qu’annoncer simultanément la suppression des départements et la diminution drastique du nombre de régions avant d’avoir défini clairement le nouveau schéma de fonctionnement ne peut conduire qu’à de l’agitation inutile et détourner l’attention des vrais problèmes.
Le Big Bang territorial annoncé par Manuel Valls tient plus pour l’instant du foutoir et du défouloir territorial.
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
Voir le profil de Daniel Sauvaitre sur le portail Overblog