La première page de la Charente libre de samedi annonce que CL ouvre les débats à Barbezieux. Juste en dessous du titre on peut voir une photo des trois candidats
conviés au débat. Le choix éditorial de cette photo est très intéressant et mérite d’être étudié d’assez près. Dans un premier temps, trop absorbé par la lecture de la transcription du débat, je
n’y avais pas prêté attention. C’est en écoutant les réactions autour de moi de lecteurs plus attirés par les titres et les images que j’ai regardé plus attentivement. La photo est prise au grand
angle. Au milieu, derrière la table se trouve René Vignerie. Jean Yves Mallard et Benoît Delatte sont de chaque côté du maire qui se tient droit, regard à bonne hauteur ; il parle et avance
les mains doigts écartés. Ses challengers baissent les yeux, regardent ailleurs et semblent comme rejetés hors du cadre, déformés par la distorsion oculaire du grand angle. Benoît Delatte a la
main gauche posée en avant sur la table. Sous l’effet du grand angle elle parait énorme quand l’autre apparaît toute petite. La photo du groupe dans les pages intérieures reproduit ce même
sentiment des deux challengers qui penchent et semblent s’effacer pour mieux laisser voir René Vignerie. Cette photo, par l’effet qu’elle produit auprès de ceux qui la regardent et qui plus
nombreux que les lecteurs de longs textes se nourrissent avant tout d’impressions, traduit un engagement évident de la rédaction pour le maire actuel. Une sorte de prime au sortant dont on
bénéficie dans ce journal quand on se dit de gauche sans doute.
(en allant sur le site de CL ce matin lundi 4 à la page Barbezieux on peut voir une photo bien plus respectueuse des débatteurs. La démonstration toute simple qu'un
autre choix était possible, plus neutre).
Un peu comme les photos, les petits encadrés attirent la curiosité des lecteurs. Dans celui intitulé « les styles collent à l’étiquette » on peut lire ce
portrait de Benoît Delatte : « chef d’entreprise affilié au Medef, leader de la droite, affiche la tranquille assurance du gestionnaire sage et pragmatique, l’allure lisse du
notable établi ».
Chef d’entreprise, c’est vrai il l’a été pendant quinze ans de sa vie. Affilié au Medef c’est aussi vrai, mais cite t’on l’appartenance syndicale de ses challengers
pour les caractériser aux lecteurs ? Je ne l’ai pas remarqué. La charge symbolique de l’appellation est telle qu’il serait dommage de se priver de répéter en boucle ce sigle, épouvantail à
électeurs. Je suis moi-même affilié au Medef au travers d’une société commerciale dont je suis coresponsable. Ces derniers temps je me suis pourtant laissé dire par quelques observateurs que
l’action telle que je la conduis aux 3B s’apparente à de la sociale démocratie plutôt qu’à du libéralisme compte tenu de sa composante sociale assez volontariste. Me coller en permanence le sigle
Medef suffirait-il à mieux me faire connaître honnêtement aux électeurs ? J’en doute.
Leader de la droite. Il n’a pas de carte, bien qu’il vote à droite mais avec de fortes tentations Bayrouistes qui le situent plutôt au centre, et que je sache
il n’a conduit à ce jour aucun combat politique partisan. Je vous l’accorde ma remarque est peut-être emprunte d’un peu de jalousie pour le titre. Nul n’est parfait.
« Tranquille assurance du gestionnaire sage et pragmatique », pourquoi pas. « L’allure lisse du notable établi » c’est quoi t’es ce ? Le
petit Robert nous donne deux acceptions pour le terme qui peuvent se rapporter à l’utilisation qu’en fait l’auteur de l’article. La première se traduit par « qui occupe une situation sociale
importante ». Et la seconde « personne à laquelle sa situation sociale confère une certaine autorité dans les affaires publiques ». Il me semble que le qualificatif vaut tout
autant pour le maire actuel que pour Benoît Delatte, mais compte tenu de sa connotation conservatrice ou mollassonne il est sans doute plus judicieux de l’affubler à ce candidat quand on sert un
objectif précis.
Je connais un peu son histoire personnelle et ce qui me semble notable c’est que ce n’est pas le mot que je choisirais pour le caractériser. Je me souviens avoir
participé avec lui à une formation où chacun en fonction de son profil psychologique de trouvait défini par deux adjectifs. Pour Benoît c’était « aventurier prudent ». Fils de paysan,
bonnes études techniques, début de carrière professionnelle à Creusot Loire puis progression de carrière dans la construction métallique dans une grande entreprise. Ensuite, rupture avec un
statut enviable de salarié bien rémunéré pour se lancer (et entrainer sa famille et risquer son patrimoine) dans la difficile aventure de la reprise d’une entreprise en dépôt de bilan pour la
redresser et en faire à nouveau une entreprise profitable qui embauche et se développe pour la transmettre ensuite à un groupe plus important qui pourra encore la développer. Et tout frais à
peine sorti de l ‘entreprise rechercher avec une équipe la confiance des électeurs pour développer la ville où l’on vit depuis quinze ans, ce n’est pas vraiment ce que j’ai envie d’appeler un
parcours de notable au sens de l’acception la plus commune du terme. Dans cet exemple aussi le choix de l’image que l’on colle à un candidat est un acte politique.
Ce qui ne me dérange pas du tout si c’est dit clairement.