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….Ou quand toutes les pommes voient rouge. (7)

Non mes très chers lecteurs, je n’ai pas oublié que je vous ai promis une septième dose d’antidote à l’intoxication télévisuelle dont vous avez été les innocentes victimes en prime time le 5 mars 2015. Je suis d’autant plus motivé à ne pas lâcher cette sale affaire que c’est avec vos impôts que l’on a tenté de vous enfumer cette fois encore.

Peut-on d’ailleurs regarder la télévision publique sans risques majeurs pour notre libre arbitre ? France 2, en pourrissant la pomme avec cet Envoyé Spécial de très mauvaise facture, nous a malheureusement démontré que non.

En fait, j’ai aussi été rappelé à l’ordre ce matin par un message d’un collègue arboriculteur laissé sur ma boite vocale. Depuis ses superbes coteaux de Prayssas en Lot et Garonne, Alain, la voix inquiète, tenait à m’alerter d’un courrier des lecteurs paru dans le journal Sud Ouest de ce samedi.

Un certain Pierre Pedaugez de Biarritz, gratifié quand même de deux larges colonnes de la page Débats en dessous d’une grande photo couleur de pommes flottant dans l’eau (page 10), se délecte des stupidités d’Envoyé Spécial et en rajoute une bonne couche de bêtise crasseuse. Son « Histoire de pommes » est à vomir debout.

A le lire, on sent l’esprit tordu. Même altéré mondialiste il me semble. Parce que les éléments habituels de l’horreur économique, écologique et sanitaire de la pomme ne lui suffisent manifestement pas. En plus des traitements chimiques, à le lire, « notre belle pomme pourrait avoir subi une ionisation ou radiation (sic) ». Parce que croit-il savoir l’ignorant « cinq sociétés opèrent en France ». A la fin de sa démonstration morbide que je vous invite évidemment à lire, ct’ apôtre Pierre conclut : « Loin de notre esprit de penser que ce beau fruit est sûrement bourré de pesticides, et qu’en plus il a été peut-être irradié et gazé. Bon appétit. » 

A mon sens, il faut que Sud Ouest soit un peu trop à l’ouest par moment pour publier de tels écrits diffamatoires pour la pomme. Et bourrier des lecteurs conviendrait bien mieux à cette rubrique quand elle donne à lire autant d’âneries.

Cela me ramène quand même mes chers lecteurs au reportage à charge d’Envoyé Spécial et à la qualité sanitaire des pommes au regard des pesticides qui y est suspectée.

Parce que finalement après l’inquiétante description de l’utilisation des produits phytosanitaires pour la production des pommes tout au long du reportage, il fallait bien à la fin que nos drôles de dames répondent à la question posée au début de l’émission. « Peut-on encore manger des pommes en toute sécurité ? ».

Naïvement mes chers lecteurs, vous imaginiez sans doute que dans notre beau pays si fier de son Etat et de ses services publics, Valérie Rouvière serait allée interroger quelques scientifiques du côté de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Ou peut-être carrément à l’Agence européenne pour la sécurité des aliments.

Que nenni mes amis. Le seul, l’unique expert sollicité pour parler au grand public des résidus de produits phytosanitaires sur les pommes s’appelle François Veillerette. Professeur des écoles, militant écologiste créateur de l’associations Générations Futures devenu conseiller régional en Picardie, il est le lanceur d’alerte courtisé qui se répand partout pour distiller la trouille du résidu. (voir aussi l’article que lui a consacré Gil Rivière Wekstein pour Agriculture environnement)

Quand on lui présente une analyse pourtant parfaitement conforme à la législation en vigueur, la voix calme, très clergyman et l’air du gendre idéal, il s’interroge. Dès lors qu’il apparait le nom d’une molécule pour quelques ppb, on l’entend invariablement dire qu’elle est suspectée de pouvoir être cancérigène ou bien perturbateur endocrinien. Effet garanti. A peu de frais il inquiète et les micros se tendent. Mais tout ça n’est quand même pas assez visuel. Alors avec son couteau, il pèle la pomme et explique que selon certains auteurs il faut enlever jusqu’à 8 mm d’épaisseur de peau pour purifier la pomme des pesticides. Le spectateur horrifié se souvient alors qu’on lui a dit juste avant que la pomme bio, elle, n’en contient aucun. On peut donc se sauver et le monde avec. Pas besoin d’épiloguer tant tout ça parait être l’évidence même.

Alors mes chers lecteurs je vous propose une lecture indispensable pour commencer à mesurer l’imposture et le charlatanisme de tous ces faussaires des sciences qui prospèrent en agitant peurs et insinuations contre la pomme. Je vous laisse apprécier vous-même la mise en perspective de tout cela par Bruce Ames, professeur de biochimie moléculaire à l’université de Californie. Le résultat de ses recherches, comme celles de bien d’autres scientifiques mériteraient bien plus d’être présentées sur les chaines de service public que les approximations nulles et fausses du pollueur d’antenne François Veillerette.

Et voilà mes privilégiés lecteurs. Vous au moins vous savez qu’il faut croquer des pommes sans hésiter. Que leurs bénéfices pour la santé sont immenses. Qu’il faut les choisir belles et sans trop d’altérations d’épiderme. Méfiez vous des moches, des moisissures, des pourritures et des marques d’attaques d’insectes. Parce que ces fruits ne sont pas parfaitement sains. De plus ils ont du produire beaucoup de produits chimiques naturels que votre organisme n’est peut-être plus très habitué à digérer. En tout cas soyez prudents quand vous en faites manger à vos enfants.

Vous avez aussi compris que ce ne sont pas les pommes qui sont inquiétantes, mais bien plus tous ces corrupteurs d’intelligence qui sévissent dans nombre de médias et bizarrement surtout sur le service public. Croquez des pommes et jetez leur le trognon sur la trogne. Ça guérit des peurs et ça désinhibe les défenses naturelles contre la bêtise dont nous avons tellement besoin par les temps qui courent. 

Je vous mets aussi un lien vers un article du professeur Narbonne de l'ANSES sur la fameuse analyse de cheveux de Générations Futures

Ce numéro 7 marque la fin de cette série d’articles. Il y aurait pourtant encore beaucoup à dire sur cet Envoyé Spécial et ses mauvais traitements de la pomme. Espérons maintenant qu’il n’y ait pas besoin d’une saison 2 à cette saga.

Il semble quand même que cette série vous ait intéressé. Ce blog a battu les records de fréquentation depuis sa création le 31 décembre 2005 avec 9173 visiteurs uniques ce mois. J’y vois un bel encouragement à prendre la parole et à diffuser des messages sur le net. Effet papillon garanti.  

PS: je vous ferai le Pdf de l'article du courrier des lecteurs de SO lundi...

Les pesticides: questions réponses du Comité de l'Ain de la ligue contre le cancer

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À propos

Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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D
A Julien<br /> En Allemagne en 2011 combien de morts par E Coli?? et combien de personnes sont encore en soins à vie?? La production bio a aussi ses problèmes et ses limites...Pour produire des fruits bio combien fait on de traitements?? La coopérative fruitière près de chez moi m'indique qu'en verger éco responsable il y a 25/30 traitements dont un tiers avec des produits bio Pour les vergers bios de la même coopérative ils réalisent 28 à 33 traitements.On fait croire aux consommateurs qu'on peut produire des pommes sans traitements...
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F
Finalement, c'est une question de sensibilité. Rien de ce qui a été dit dans le reportage ne semble faux, d'après vos critiques uniquement sur la forme.
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J
Des Français Choqués (agriculteurs compris) du reportage d'Arte Pesticide et santé:l'équation sans solution,surtout lorsque l'on montre du doigt des éleveurs Allemands malades et qui ne peuvent plus travailler de leur métier qu'ILS aimaient temps,et que l'on dit qu'ils ont fait n'importe quoi !!!<br /> http://www.arte.tv/guide/fr/050772-000/pesticide-et-sante-l-equation-sans-solution
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J
Au milieu des années 1990, des milliers de bovins meurent dans les étables. Malformations des veaux, fausses couches des vaches et problèmes de stérilité déciment les troupeaux. Les agriculteurs eux-mêmes ne sont pas épargnés et rencontrent divers graves problèmes de santé. Un éleveur de porcs danois a comparé sur plusieurs années les taux de pesticide dans l'alimentation de ses animaux et ceux de malformation des porcelets. Des chercheurs français, eux, ont mené une étude méthodique sur le problème. Les très longues et laborieuses analyses entreprises finissent par aboutir : les bêtes malades présentent dans leur organisme un taux très élevé de glyphosate – le désherbant le plus vendu au monde. Or, l'immense majorité des rations servies aux bêtes dans le nord de l'Europe proviennent de céréales OGM importées d'Amérique, dont les graines contiennent de grandes quantités de cet herbicide, pour l'instant défendu bec et ongles par le puissant lobby agro-alimentaire européen.
J
L'étude de Bruce Ames est plus ancienne encore : début des années 1990. Elle a été publiée en français par La Recherche en octobre 1999. <br /> Elle a été réactualisée plusieurs fois, mais sans changement fondamentaux. Tout simplement parce qu'elle est approuvée par les toxicologues non militants (et n'est contestée qu'en dehors des milieux de la toxicologie). Elle est abondamment citée par tous ceux qui s'intéressent à la question de l'impact des résidus de pesticides dans l'alimentation.<br /> Les recherches plus récentes de Bruce Ames se sont orientées sur la question des micronutriments, dont, selon lui, la déficience légère sur le long terme pourrait être une cause de maladies de la vieillesse, du type cancer, déficiences cognitives. Voir http://www.nutranews.org/sujet.pl?id=1107<br /> Pour voir, sur une page de l'Université de Berkeley, l'activité récente de Bruce Ames : https://mcb.berkeley.edu/faculty/BMB/amesb.html (in English)
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S
Il suffit de réfléchir deux secondes : alors que des aliments du bétail « bourrés » de glyphosate sont utilisés presque partout dans le monde, comment se fait-il que seuls le bétail et des éleveurs (pas tous...) d'une région de l'Allemagne du Nord soient atteints ?<br /> <br /> Malheureusement ce genre de raisonnement échappe aux prêcheurs d'apocalypse.
I
L'article du courrier des lecteurs de SO est aussi sur le blog : <br /> http://lecteurs.blogs.sudouest.fr/archive/2015/03/29/la-belle-pomme-1034455.html<br /> J'ai mis un lien vers ton blog en commentaire.
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D
Merci Isa
D
Cette étude date de 1999 a t'elle été validée par d'autres études plus récentes?? Depuis 15 ans il doit y avoir des suites à cet article...
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J
Bonjour,<br /> La traduction de l'article de Bruce Ames mentionnée sur votre blog continent deux erreurs dues à une traduction rapide de la part de La Recherche en octobre 1999.<br /> Ce n'est pas 99,9% de pesticides naturels que nous ingérons, mais bien 99,99%. Ce qui mène bien à ce qui est dit plus loin : 10 000 fois plus que de résidus de pesticides artificiels.<br /> De plus ce n'est pas 1,5 mg de pesticides naturels que nous ingérons chaque jour, mais bien 1,5g (1.500 mg). L'erreur vient du fait qu'en anglais américain 1.500mg s'écrit 1,500mg....<br /> Une fois corrigé, c'est cohérent avec le chiffre annoncé par ailleurs pour l'ingestion de résidus de pesticides de synthèse, qui est de l'ordre de 0,15mg par jour (soit 10.000 fois moins)<br /> Le texte original in English de Bruce Ames permet de vérifier : http://toxnet.nlm.nih.gov/cpdb/pdfs/Paustenbach.pdf (voir en bas de la page 5). Ce textye de 2002 reprend sous forme améliorée les mêmes données que son texte précédent.<br /> Cette erreur a été reconnue par La Recherche en sont temps, mais continue de circuler par citation sans vérification.
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L
Très en vogue, le même type de reportage a été fait sur Canal + sur le vin. Même scénario, mêmes rebondissements, mêmes raccourcis scientifiques, etc.
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