22 Février 2011
Quelques lecteurs de ce blog ont interrogé par mail Isabelle Saporta pour connaître sa position sur ce que j’ai écrit dans l’article qui précède. Une de ses réponses m’a été transférée. Elle est conforme à celle que publie Cyril dans son commentaire, sans mention toutefois du paragraphe, qui semble avoir été rajouté spécifiquement pour Cyril, où elle relève des « propos injurieux, diffamatoires et antisémites » susceptibles de lui permettre de faire fermer mon blog. Avant de me prononcer sur ce qui serait une étonnante diversion, je souhaite d’abord être en possession du mail original qui en comporte les termes.
Donc dans son mail d’hier soir, la journaliste affirme que les pommes qui ont fait l’objet d’une analyse de résidus et dont on commente les résultats dans le documentaire sont bien les miennes. Le problème, c’est que lors de l’entretien téléphonique que j’ai eu avec elle dimanche soir, elle a justement reconnu le contraire. Dans ces conditions mes chers lecteurs, par nécessité et pour aussi être en phase avec un certain journalisme d’aujourd’hui, à mon tour, ce soir j’enlève le off.
Il était plus de 21 heures dimanche soir quand j’ai été appelé par Isabelle Saporta qui était furieuse contre moi parce que je vous avais communiqué son numéro de portable et son adresse e-mail. Elle me demandait instamment de les retirer de mon blog. Le ton est monté et j’ai fait valoir de mon côté que la manipulation dont j’avais été l’objet était d’une toute autre gravité. Dire à la France entière que je vends des pommes sur lesquelles on retrouve des produits interdits peut rendre un brin inélégant, il me semble. C’est alors que dans le désordre, Isabelle Saporta m’a indiqué n’être entrée dans le projet que bien après la visite du reporter dans mon verger, qu’elle comprenait que je sois en colère contre la manipulation dont j’avais été l’objet, qu’en revanche la production s’en foutait, que la télévision était un milieu pourri, qu’elle n’en referait plus, que je n’avais qu’à m’en prendre à ses confrères ou à François Veillerette, que bien sûr elle savait que les pommes analysées n’étaient pas les miennes et que justement dans son livre elle reliait les analyses résidus aux pommes brésiliennes et pas aux miennes….
Moi, vous me connaissez, devant tant de sincérité, j’ai évidemment craqué et dit oui à sa demande. Comme je tardais un peu à retirer ses coordonnées, ayant entrepris une relecture minutieuse pour peaufiner la syntaxe et choisir de remplacer un ou deux mots trop expressifs, elle m’a rappelé moins d’une heure plus tard et la discussion a repris quelques instants sur le même registre. Elle était vraiment très pressée, semblait-il, de voir s’interrompre son courrier des lecteurs.
Dès que ce fût fait, je lui ai adressé le sms que je vous reproduis ci-dessous, ainsi que sa réponse, la mienne, la sienne et ainsi de suite.
Moi :
C’est fait. Je modifie encore le texte…la nouvelle version sans « gourdasse » sera en ligne dans 20mn.
Elle :
Merci
J’aimerais effectivement que nous ayons l’occasion d’échanger à votre prochain passage à Paris. Vous avez mon portable. A bientôt donc.
Moi :
Vous avez décidemment un pouvoir énorme. J’espère que vous vous en rendez compte…A bientôt. Désolé de cette guerre que je n’ai pas voulue.
Elle :
Moi non plus. Et j’aimerai vraiment échanger avec vous dans d’autres conditions que celles de ce soir.
Moi :
Moi aussi. Le sujet est d’importance et je crois que nous sommes de bonne volonté tous les deux.
Elle :
Bien entendu. Dialoguons. Et la prochaine fois n’hésitez pas à me téléphoner directement. Je n’ai pas pour habitude de me dérober.
Moi :
Je m’en souviendrai. Je me lâche un peu quand je suis en colère.
On voit à travers cet échange que la tension était montée très haut et que chacun de nous semblait apprécier en fin de soirée qu’elle baisse. Je sentais quand même mon entourage familial assez dubitatif sur ce revirement et femme et filles m’incitaient à une prudence dont je ne suis pas vraiment familier.
Et j’ai pris connaissance des mails adressés depuis par Isabelle Saporta à ses interlocuteurs. Et puis je viens de recevoir la confirmation que son couplet sur mon blog qu’elle veut faire fermer parce que j’y tiendrais des propos antisémites est bien d’elle.
Me voilà durement ramené à la réalité. D’autant plus que depuis dimanche j’ai acheté en ligne la version numérique de son bouquin (13.99 € difficiles à justifier !) pour lire attentivement les pages désolantes qu’elle consacre aux pommes. Ma critique énervée tout autant que rationnelle fera l’objet de mon travail d’écriture du week-end.
Ça me fait tout bizarre que l’on puisse m’accuser d’antisémitisme. Parce que l’’idée de racisme m’est tellement inconcevable qu’il m’arrive de penser que le Mahatma Ghandi et Jésus de Nazareth sont presque modérés comparativement à moi dans ce domaine. Et puis c’est une coïncidence assez inattendue, puisque j’avais prévu de vous parler, si FR3 n’avait pas perturbé mes priorités, de ma ballade dans Berlin il y a 10 jours et de ma visite du mémorial de l’Holocauste. Vous pouvez voir dans l’avant dernier article « Berlin d’est en ouest » le lien vers les photos que j’ai faites du parterre des 2711 stèles érigées en 2005 et sous lesquelles je me suis glissé samedi, en fin d’après midi. Presqu’immobile, silencieux au milieu de visiteurs tout aussi muets que moi, lisant à l’entrée cette citation de Primo Lévi, « C’est arrivé, alors cela peut se reproduire : voilà l’essence de ce que nous avons à dire », j’ai progressé lentement le long des photos et des textes relatant la montée de l’antisémitisme en Allemagne, depuis le début des années 30 jusqu’à la Shoah. Et puis je suis entré dans la salle suivante, dans le noir, marchant sur les dalles où sont gravés les mots des persécutés. Je suis resté là longtemps à attendre d’avoir les yeux secs et moins rougis pour pénétrer dans la pièce suivante où l’on découvre les albums de si belles familles juives de toute l’Europe et d’Afrique du Nord. Plus le temps passe et plus le plus profond de mon être est empreint de la conscience de cette menace de la folie des hommes.
C’est vrai, je dois le reconnaître, ce ne sont pas les pesticides qui me font le plus peur en ce bas monde, et de moins en moins au fur et à mesure où il me semble que les normes publiques deviennent plus drastiques. J’ai bien plus présent à l’esprit cette parabole des évangiles qui dit que « ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme, mais ce qui sort de la bouche, c’est ce qui souille l’homme ».
Comment peut-on être une journaliste forcément attachée à la liberté d’expression et menacer avec autant de désinvolture de faire fermer un blog ? Il me semble que le vrai visage du livre et du documentaire mis sur le marché par cette équipe et la boîte de production se révèlent dans ce comportement indigne.
Je tiens pour d’autant plus précieux le travail des journalistes que je lis chaque jour dans les nombreux quotidiens, hebdomadaires et autres sites d’infos que je vous cite souvent et dont je sais le souci déontologique. Je ne confonds pas les uns et les autres.
Je me suis demandé s’il ne serait pas utile que je vous redonne ses coordonnées mails qui sont peut-être sur son bouquin pour que vous puissiez à nouveau parler de tout cela avec elle. Qu’en pensez-vous ?
PS : Je vous mets un lien vers un article du Sud Ouest de ce jour qui relate des propos d’Isabelle Saporta assez conformes pour partie à ce que je vous ai retranscrit de nos échanges.
Je vous mets également en pièce jointe la contribution à un chat en direct organisé par « 20 minutes.fr » par Pierre qui a été censuré peu de temps après avoir été mis en ligne. Vous jugerez par vous-même de la sévérité de la censure dans certains média. Vous penserez peut-être comme moi que ce n’est vraiment pas rassurant.
Malgré tout cela je me suis rendu ce matin à Pessines, à la demande de FR3 Région Poitou Charentes pour y évoquer les performances de la pomme à l’export cette année, aux côtés des dirigeants de la très belle entreprise Daudet Fruits, que j’espère compter parmi les membres de l’ANPP sous peu. Le reportage a été diffusé ce soir pendant le journal de 19h.
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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