15 Juillet 2006
Dans son édition datée du jeudi 13 juillet le Monde retranscrit l’intégralité du discours prononcé par Jacques Chirac en hommage au capitaine Alfred Dreyfus à l’occasion du centième anniversaire de sa réhabilitation après qu’il ait été injustement accusé de trahison. La cérémonie s’est déroulée à l’école militaire, sur les lieux même ou Alfred Dreyfus fût dégradé en 1895 puis décoré le 21 juillet 1906. Je ne sais pas qu’elle est la plume qui a écrit le texte prononcé par le chef de l’Etat mais le résultat est à la hauteur de l’évènement. Quelques mots puissamment évocateur pour cette monstrueuse affaire dont on retient aujourd’hui encore les noms de ceux qui ont eu le courage de lutter pour que la vérité soit faite et l’innocence du capitaine Dreyfus reconnue. Dreyfus lui même, et puis Clemenceau, Emile Zola, Anatole France ainsi que d’autres figures célèbres sont cités par le Président. Il manque quand même à sa liste le natif d’Aubeterre Ludovic Trarieux dont le rôle essentiel est parfaitement reconnu aujourd’hui. J’ai pu en prendre plus clairement conscience samedi dernier, ayant eu le plaisir de participer au colloque (Dreyfus réhabilité. cent ans après) qui s’est tenu à Aubeterre au couvent des minimes à l’initiative d’Evelyne Renou qui anime Edhlut (Espace Droits de l’Homme Ludovic Trarieux) et de Maître Bertrand Favreau de l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bordeaux. J’ai découvert il y a quelques mois, lors d’une de mes visites à Aubeterre, l’espace Ludovic Trarieux aménagé dans sa propre maison natale par Evelyne qui en est aujourd’hui propriétaire. J’ai apprécié l’endroit et le travail d’Evelyne. C’est pourquoi lorsque avec l’invitation au colloque j’ai reçu un petit mot d’elle, déjà très intéressé par l’affiche, j’ai su que je devais venir. Bien m’en a pris tant les intervenants ont été brillants. Il est passionnant de comprendre comment les choses se sont passées et quel a été le comportement des hommes. Mais il est plus utile encore de tenter de savoir comment nous pouvons cent ans après quasiment tous nous identifier aux justes et dénoncer les monstres qui ont assumé cette machination alors qu’il n’est pas sûr que face à la même affaire aujourd’hui nous ayons un comportement très différent de celui des individus de l’époque. Finalement rares sont ceux qui savent trouver la voie juste lorsqu’une affaire Dreyfus survient. Et c’est au quotidien au plus près de ce que nous vivons qu’il y a matière à s’exercer et à réfléchir au delà des idées reçues et des évidences pour penser par soi-même et faire le choix toujours difficile de s’engager pour le parti ingrat de la vérité.
Les évolutions en cours à l’hôpital de Barbezieux nous mettent en situation de devoir méticuleusement analyser les attitudes, les comportements, les déclarations et les actes de ceux qui exercent une responsabilité dans l’administration et la direction de l’établissement aussi bien que dans le travail quotidien au plus près des malades. Au delà des contraintes réglementaires, économiques ou hiérarchiques, les hommes et les femmes sont déterminants pour les résultats obtenus et les évolutions en cours. Je vois avec effroi se profiler et se confirmer la désignation d’un bouc émissaire pour masquer et couvrir les vrais responsabilités des difficultés rencontrées par cet hôpital. Il paraît que Dreyfus était le coupable idéal tant il était difficile à défendre et proche de ce que la masse se plait à détester. C’est souvent le cas des boucs émissaires. Voilà une bonne occasion pour chacun d’entre nous de mettre son envie de justice à l’épreuve des faits.
Je suis reparti de ce colloque qui, je me répète, a été passionnant de bout en bout, avec deux interrogations. La première c’est la question soulevée par Dominique Noguères, avocate au barreau de Paris et vice présidente de la ligue des droits de l’homme et du citoyen, qui fera l’objet cet automne d’un travail de réflexion de la ligue. Notre recherche effrénée de sécurité, dans un monde ou la technologie évolue sans cesse pour nous mais aussi pour nos éventuels agresseurs, est-elle compatible avec la protection des libertés individuelles et des droits de l’homme. En clair, est ce que pour me protéger, pour ma sécurité, je ne suis pas amené à mettre en danger des droits essentiels et des pans entiers de ma liberté individuelle. Mon besoin de sécurité me fait-il accepter Big Brother qui peut un jour me priver de toute liberté et donner ainsi raison à Georges Orwell? Peut-il réellement y avoir liberté sans acceptation d’un risque ? La question vaut pour de nombreux sujets, pour la nourriture par exemple mais aussi pour tous les aspects de notre vie quotidienne.
L’autre question est d’actualité et la réponse tout aussi difficile à trouver. Comment peut-on concilier respect des droits de l’homme et maîtrise de l’immigration ? Maître Christian Charriere-Bournazel, avocat et vice-président de la LICRA, a qui je demandais ce qu’il y avait lieu de faire pour les sans papiers, et tout particulièrement pour ceux visés par la circulaire Sarkozy dont les enfants sont scolarisés en France quelquefois depuis longtemps, m’a répondu que la question était politiquement explosive et que le ministre sans avoir assez étudié le dossier et en ouvrant brutalement un droit à la régularisation s’était mis dans une situation plus que délicate. Plus de questions que de réponses..
Pour cette période de fortes chaleurs et de vacances, tout ça n’est pas très léger j’en conviens !
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
Voir le profil de Daniel Sauvaitre sur le portail Overblog