12 Octobre 2008
Le préfet de la Charente a eu une intervention très tonique jeudi soir à Rouillac pour clore la réunion du Medef consacrée à l’analyse des forces et des faiblesses de notre département et à des propositions d’action pour en améliorer le développement économique.
Il a repris la parole dès le lendemain pour une conférence de presse tout aussi percutante, si l’on en croit la retranscription publiée par Sud Ouest et la Charente Libre hier.
CL a d’ailleurs extrait de l’entretien une petite phrase qui a du irriter bien au-delà de la cible prévue. « L’intercommunalité ne doit pas servir de complément de retraite à des élus qui ont perdu leur mandat » aurait-il dit. Bonjour la provoc ! En fait le tacle ne s’adressait qu’aux présidents des syndicats primaires intercommunaux d’électricité qui perdurent alors qu’ils auraient du disparaître depuis belle lurette. En remplacement, l’organisation interne du syndicat départemental d’électricité n’aura aucune difficulté à se doter de commissions d’élus en interne pour avoir l’avis du terrain. J’ai déjà dit ici l’urgence qu’il y a à prendre à bras le corps l’amélioration de l’efficacité de notre organisation collective pour que nous en ayons pour notre argent et notre sueur. Compte tenu de la difficulté rencontrée pour résoudre ce simple problème dérisoire, on comprend mieux la dimension herculéenne de la tâche à accomplir à l'échelle du pays. D’autant plus en ces temps de retour de la mystique de l’Etat planificateur, régulateur, bon, juste et tout et tout. On oublie en effet que nous sommes tous potentiellement des présidents de syndicats primaires d’électricité, capables de trouver mille justifications et de trainer la patte pour faire perdurer une organisation qui n’a plus lieu d’être et qui épuise financièrement ceux dont les ressources proviennent du secteur exposé de l’économie. La recherche de l’Etat optimum pour une société n’est pas chose facile. Selon les lois et les règles que nous adoptons les individus donnent le meilleur ou le pire d’eux-mêmes. L’Etat, les collectivités locales ou les entreprises publiques ne sont pas des entités désincarnées. Elles sont composées d’individus, élus ou salariés, dont le comportement est en grande partie déterminé, ou plutôt progressivement infléchi, par des contraintes qui ne sont pas celles du marché, mais celles de l’élection pour les uns, du statut et des conditions de travail pour les autres. Les mécanismes qui conduisent à l’innovation, à l’amélioration de l’organisation et de l’efficacité y sont moins stimulés que dans le secteur concurrentiel pour lesquels c’est une question de survie. Autant dire que ce n’est pas un problème de réglage des circuits financiers sur la planète, aussi complexe soit-il à résoudre ou à améliorer, qui me fera renoncer aux principes fondamentaux du libéralisme politique et à l’économie de marché. Besancenot, Hamon, ne me font ni rire ni rêver. En revanche je sais mon cher John que l’on peut débattre à l’infini des réglages, des règles, des lois dont il faut se doter pour atteindre les objectifs de revenu, de justice sociale et d’IDH (indice de développement humain) que nous souhaitons atteindre.
Revenons maintenant aux propos du préfet sur l’intercommunalité. Si les mots qu’on lui prête sont exacts, il apparaît nettement que ses informations ne sont pas à jour. Il n’est bien entendu nullement au programme de doter les pays des compétences des communautés de communes. C’est exactement l’inverse qui est à l’ordre su jour. Les pays sous leur forme actuelle vont disparaître et leur fonction sera totalement assurée par les communautés de communes une fois que toutes les communes auront rejoint volontairement ou par force une communauté. Selon les sources cet horizon se situe entre 2010 et 2014. En revanche les préfets qui ont, il faut le rappeler, validé les périmètres des intercommunalités tels qu’ils sont aujourd’hui auront plus de pouvoir pour inciter à la constitution de communautés plus grandes. Pour autant je doute qu’il soit pertinent de continuer d’afficher le périmètre du pays comme étant l’objectif à atteindre. Parce que si l’on en croit les réflexions en vigueur à l’assemblée et au ministère il faut se préparer aussi à faciliter l’éclosion d’une entité unifiée communes communauté avec un conseil municipal élu au suffrage universel et le maintien conjoint de l’entité commune qui n’aurait quasiment plus de compétences en propre et un budget affecté très limité. Cet objectif suppose une intercommunalité géographiquement moins vaste. A ce jour, légitimité démocratique directe mise à part, certaines communautés ont volontairement poussé très loin l’intégration des compétences et déjà atteint cet objectif. La solution à l’émiettement communal français unique en Europe sera recherché au travers de ces nouvelles entités issues de communautés de communes très intégrées, dirigées directement par des élus issus du suffrage universel, tout en maintenant aussi l’entité commune. Pour ceux qui souhaitent approfondir vous pouvez télécharger le rapport Warsman sur le site des échos.fr, dernier en date de très nombreux rapports qui disent tous un peu la même chose. J’espère que 2009 sera l’année du passage à l’acte.
Pour ce qui concerne les routes, c’est dans Sud Ouest que l’on apprend par François Burdeyron quels sont les engagements de l’Etat. Pour faire simple il confirme que les déviations de Chabanais et de La Rochefoucauld, comme la mise à deux fois deux voies au nord de Barbezieux seront mises en service entre 2010 et 2012. Une nouvelle fois pas un mot sur le tronçon Reignac Chevanceaux. Et pour cause. En fait, les opérations précitées ont nécessité d’engager par avance le budget du PDMI qui sera annoncé dans les mois à venir. Je crois savoir que ce PDMI qui définit les priorités et le budget pour les sept années qui viennent aura péniblement de quoi financer les opérations en cours. Il n’y aurait aucun moyen prévu pour le tronçon Reignac Chevanceaux. Le conseil général privilégie la RN 141 parce que des villages sont traversés par l’axe routier et ses poids lourds. La RN 10 n’est pas la priorité si l’argent manque. De plus avec des parlementaires, le conseil général et les principales villes à gauche, l’attention de l’Etat aux demandes départementales se fait beaucoup plus distraite. Aussi inimaginable que cela puisse paraître, la probabilité de repousser de sept ans l’aménagement de Reignac Cheavanceaux est énorme. Ce qui signifie que dans sept ans il restera encore une trentaine de kilomètres à deux voies entre Angoulême et Limoges, le tronçon Reignac Chevanceaux ainsi que des passages à niveau au nord d’Angoulême. La seule solution à ce jour pour gonfler l’enveloppe du PDMI et engager les travaux au sud de Reignac c’est de bloquer la route pour que la gène soit intolérable. Tout ce que je déteste, mais dont je sais bien maintenant que c’est le seul moyen pour infléchir les décisions prises. Mais finalement puisque cette route est considérée par Paris comme d’un intérêt seulement local, l’obstruction ne devrait pas poser de gros problèmes. L’autre solution aurait été que le département parle d’une seule voix pour revendiquer la transformation en autoroute de la RN10 au nord de Bordeaux, comme cela a été fait pour cette même nationale au sud, et la création d’un barreau entre Roumazières et Bellac. Ceci pour transformer le handicap d’être traversé par un fret gigantesque de poids lourds en avantage de développement économique pour la Charente grâce à une route à la hauteur des enjeux et qui mettrait définitivement notre département au cœur de l’Europe. Tout cela sans l’argent du contribuable. Ce qui faciliterait dans le même temps la mise aux normes de notre réseau plus régional. Mais sur cette question le désaccord du département avec ces propositions est total, je l’ai vérifié une nouvelle fois il y a peu.
Il est symptomatique de voir dans CL la réaction des lecteurs à l’enfer de la RN10 et aux nombreux accidents qui mettent en cause des poids lourds. La majorité pense qu’il faut interdire le passage de ces poids lourds sur nos routes. Au mieux leur faire respecter le code de la route. Personne ou presque ne voit un intérêt pour notre département d’être situé sur un axe européen simplement déterminé par la géographie. Personne ou presque ne demande une infrastructure routière adaptée à ce trafic et à notre situation. Je vois là le reflet de la communication politique majoritaire dans notre département et le manque d’ambition et de vision stratégique qu’elle traduit.
Pour ce qui concerne le centre d’enfouissement des déchets, le préfet semble résolu à faire avancer le dossier et nous
assure que dans trois ou quatre ans le problème sera réglé. Dans ce domaine aussi ce n’est pas l’initiative privée qui a fait défaut mais bien la responsabilité politique.
Il est encore un peu trop tôt pour bien mesurer à quel point la gestion publique, contrôlée pourtant par un très grand nombre d’élus, peut s’avérer d’un coût exorbitant pour l’habitant. Les
bonnes intentions et le volontarisme ne suffisent pas pour diriger efficacement et au juste prix une entreprise de services comme Qualitom.
Moi, ce n’est pas quand le préfet travaille
qu’il m’énerve, comme semble le croire François Burdeyron, c’est plutôt quand il ne fait pas son boulot.
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Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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