Mardi soir dernier à 18 heures à l’assemblée nationale, dans une petite salle de réunion au 3 rue Aristide Briand, se tenait l’assemblée générale de l’association
pour la route centre Europe atlantique (ARCEA). Député de Charente maritime à l’extrémité ouest de la route, Didier Quentin préside cette association dont le sénateur de Saône-et-Loire René
Beaumont à l’autre extrémité en est le délégué général. Parmi les nouveaux adhérents cités en début de réunion qui ont rejoints l’association depuis l’an passé j’ai noté avec intérêt le port
autonome de La Rochelle et le département de la Gironde.
Nous étions donc quatre charentais membres de l’association pour l’axe Nantes Méditerranée présents à cette assemblée générale, le président Pierre Baudriller,
Daniel Herbreteau cheville ouvrière du travail technique et cartographique, Guy Traumat président de la communauté de communes du confolentais et moi-même. Contrairement aux autres départements
traversés par le tracé de cette route, aucun parlementaire de Charente ou représentant du conseil général n’était malheureusement présent pour exprimer les attentes de notre département et
entendre les revendications des autres territoires adressées en séance au directeur des routes Patrice Parise. Dommage parce qu’il me semble que les débats ont permis de mieux comprendre les
intentions de la direction des routes et les motivations qui les fondent.
Dès son arrivée Patrice Parise, le directeur des routes au ministère de l’équipement, a été invité par le président à faire le point sur l’état d’avancement des
travaux sur la route centre Europe atlantique. Après avoir rappelé que cette route part de Royan (sic) pour rejoindre Chalons su Saône il a indiqué que le tronçon sans doute le moins avancé à ce
jour était celui qui relie Saintes à Angoulême et qu’il en était bien conscient. Il a poursuivi en indiquant qu’entre Angoulême et Limoges la déviation de La Rochefoucauld était en cours et qu’à
la demande du secrétaire d’Etat aux transports Dominique Bussereau la déviation de Chabanais allait être réalisée aussi vite que possible. Il a poursuivi en rappelant qu’il y aurait lieu ensuite
de réaliser le contournement nord de Limoges pour relier l’autoroute A20 et La Croisière. Le tracé de la RCEA selon l’expression utilisée par le directeur forme une « épingle » à
hauteur de Limoges. En effet en descendant légèrement au sud vers la capitale de la Haute Vienne pour ensuite remonter à la verticale vers la Croisière (avec un passage souvent impraticable pour
les poids lourds l’hiver) pour repartir complètement à l’est vers Montluçon, la RCEA impose un circuit assez scabreux et difficilement compréhensible pour une liaison de cette importance.
On peut même parler d’épingle double puisqu’il y a deux angles assez fermés. A ce stade de la présentation le problème en Charente semblait circonscrit à deux contournements de villages à l’est
d’Angoulême. Ensuite plus à l’est, à hauteur de Paray-le-Monial, il a informé l’assemblée de la fin de l’étude de concession autoroutière d’un tronçon de 80 kilomètres (approximativement et de
mémoire) qui a conclu à la rentabilité de l’opération sans financements publics. La décision a-t-il dit est maintenant politique. L’inconvénient de l’autoroute c’est le péage comme la rappelé le
directeur mais l’avantage en parallèle c’est que le financement ne pose pas de problème et libère le budget de l’Etat. Il a été plusieurs fois rappelé qu’à la suite du Grenelle les sommes
allouées par l’Etat pour les routes seront en baisse sensibles. L’élaboration du PDMI (plan de développement et de modernisation des itinéraires) a même été un temps interrompu pour attendre les
conclusions du Grenelle. On doit donc s’attendre à ce que régionalement les sommes qui seront allouées par l’Etat aux routes nationales soient bien inférieures à celles que l’Etat attribuait
antérieurement pour les routes dans les contrats de plan, sommes que l’on trouvait déjà bien faibles au regard des besoins. Et j’ai bien compris que face à cette raréfaction des crédits pour la
route tous les ténors des départements de France parleront très haut et très fort, comme lors de cette réunion, pour dire à quel point ils sont prioritaires sur tous les autres. Je ne suis pas
sûr qu’à ce jeu là la Charente malgré les priorités évidentes que nous décrivons depuis longtemps tire son épingle du jeu. Dès la fin de son exposé le directeur a du faire face à de vigoureuses
revendications de la part des tenants de l’axe Nantes Limoges qui passe par Poitiers qui trouvaient intolérables de ne pas être considérés comme membre à part entière du tracé de la RCEA. Ensuite
Guy Traumat a souhaité rappeler au directeur le tracé naturel de cette route qui passe par Confolens. Patrice Parise nous a alors gentiment fait comprendre comme il l’a fait pour d’autres au
cours de cette réunion qu’une fois que l’on a commencé à investir sur un tracé on ne peut pas sans arrêt changer et disperser les moyens déjà bien faibles. Et cela même si le tracé paraît
géographiquement plus cohérent. Une première intervention assez musclée de Pierre Baudriller pour monter en épingle notre problème charentais n’a pas réussi à capter l’attention du directeur.
L’intervention de Jean Valleix, qui était député de la Gironde, a heureusement contribué à maintenir les débats sur cette partie ouest de la RCEA. J’ai à mon tour exprimé dans un premier temps la
situation sur la RN10 branche sud de la RCEA dans le sud Charente entre Reignac et Chevanceaux avec ses 20000 véhicules jour dont la moitié de poids lourds qui circulent sur une deux voies d’un
autre âge pour mieux rappeler que la Charente est traversée par un corridor de fret international qui se déverse ensuite vers l’est pour rejoindre la RCEA. D’autres avant avaient souligné
l’impossibilité pour les poids lourds d’emprunter l’autoroute A89, qui passe à 1000 mètres d’altitude, près de quatre mois par an. Il se confirmait une nouvelle fois que la priorité de la dépense
publique en matière de routes nationales est donc bien entre Reignac et Chevanceaux. Cette introduction m’a permis d’insister auprès du directeur pour bien souligner que les déviations de La
Rochefoucauld et de Chabanais ne résoudraient pas le problème et qu’il resterait sur la RN 141 bien des « Reignac Chevanceaux » à résoudre sans avoir l’argent nécessaire comme il a été
plusieurs fois précisé. Tout cela pour démonter que le raccordement autoroutier entre Roumazières et La Croisière en passant par Confolens était la seule solution efficace et rapide, et qui ne
coûterait rien au budget, pour être à la hauteur des enjeux du trafic international qui traverse la Charente. Il m’a semblé que le directeur avait écouté attentivement cette argumentation. Pierre
Baudriller qui l’a bien senti aussi, s’est levé et a renchéri de manière beaucoup plus musclée pour bien hiérarchiser parmi les demandes des uns et des autres dans l’assemblée. Le trafic
international d’abord et par une autoroute concédée rentable, toutes les autres demandes étant d’un intérêt plutôt régional. Une nouvelle fois le directeur s’est montré intéressé par nos
arguments. Il a d’ailleurs clairement dit qu’il était prêt à retravailler l’analyse de la situation dans l’est Charente avec le CETE Sud Ouest à Bordeaux. C'est-à-dire avec les mêmes ingénieurs
que nous avions rencontrés et dont j’avais relaté la teneur de nos entretiens ici sur ce blog l’an passé. Pierre Baudriller a dès le lendemain adressé un courrier au directeur pour lui dire que
nous étions évidemment disponibles pour travailler au plus vite avec ses services sur le sujet.
Compte tenu de ce que nous savons et que nous vivons ici j’ai quand même été surpris en début de réunion de la perception par le directeur des routes des priorités
en Charente en matière de routes nationales. J’ai bien compris aussi le tumulte qui s’exprime dans toute la France qui infléchit souvent les priorités logiques au profit du poids politique de tel
ou tel élu. Il est dans ce cadre de plus en plus difficile d’admettre que le principal handicap de la Charente pour disposer d’un réseau routier adapté aux enjeux réside dans notre incapacité à
penser le problème collectivement et à défendre la stratégie pertinente auprès du gouvernement et de la direction des routes.
Il y a souvent des moments de découragement dans les rangs de ceux qui souhaitent une liaison aux normes autoroutières entre Chevanceaux et La Croisière face aux
résistances charentaises, les plus incompréhensibles. Eh bien notre participation à cette réunion qui m’a semblé très utile a au moins eu le mérite de nous remotiver pour poursuivre le
travail.