13 Juillet 2015
Les ministres des finances de la zone euro ont sorti leur calculette hier après midi. Ils évaluent les besoins de la Grèce à 86 milliards sur trois ans pour lui éviter la faillite. Ce n’est quand même pas une paille pour siroter le raki une somme pareille non ? Grosso modo, ça correspond au déficit budgétaire annuel de la France, à 5% de son endettement ou encore à 1350 euros par français. Mais par européen évidemment ça ne fait plus que 172 euros. Il suffirait finalement d’instituer deux à trois jours de solidarité par an pendant trois années dans toute l’Europe à la place de jours fériés pour se faire enfin mieux voir chez les grecs. Et ces ingrats d’européens que nous sommes ne doivent-ils pas ça au berceau dionysiaque de la démocratie ici bas ?
Si cette somme est prêtée à la Grèce, en plus de ce qu’il doit déjà, chaque Hellène sera redevable de 35500 euros au pays de Platon et consorts. Juste un chouia de plus que l’ardoise déjà bien salée de chaque français (32.000 €). Bon, le PNB n’est pas le même par habitant bien sûr. Sur ce critère, la dette sera double pour un grec comparativement à un tricolore. Et encore, si on se fie à la capacité respective de nos deux Etats à faire rendre gorge à ses contribuables, le différentiel s’accroit encore plus nettement. L’hypothétique remboursement de la dette du côté du Péloponnèse s’en trouve objectivement repoussé à tout le moins aux calendes grecques.
Ce qui fait douter le bailleur de fonds germanique ces jours-ci, c’est clairement que nos amis grecs ne sont évidemment pas de dociles irlandais ou allemands. Au pays d’Aristote et de Pythagore, la mathématique financière manque un peu de rigueur et la volonté de rembourser les créanciers semble toute relative.
Alors la moitié la moins naïve et la plus vertueuse de l’Europe a exigé d’Alexis Tsipras qu’il fasse voter le parlement grec d’ici au 15 juillet sur un programme ambitieux de réformes à l’allemande ou à l’anglo-saxonne, c’est selon. Ce n’est qu’après cet engagement formel que de nouveaux prêts pourront être envisagés.
Le programme de réformes souhaité d’ici mercredi est encore plus corsé pour la Grèce que celui que Tsipras a demandé à son peuple de rejeter par référendum il y a une semaine avant de proposer de le mettre en œuvre tel quel, moins de 4 jours après le refus des électeurs. Dans le genre foutage de gueule démocratique, on est rarement allé aussi loin qu’avec ce Tsipras là.
Pas un européen sensé ne peut sérieusement envisager d’augmenter sa créance envers la Grèce et son gouvernement d’extrême gauche à qui il est demandé de mettre en œuvre un programme libéral contraignant. Mais voilà, maintenant que l’euro a fait ce type de ravage chez les cigales méditerranéennes, il n’y a pas vraiment d’autre option que celle d’assumer les réparations.
Sauf que, un peu comme en Grèce, ce sont les citoyens qui à la fin ont le dernier mot. Et ils ont le pouvoir de dire non. Le vice de fabrication de l’euro apparait maintenant très brutalement au grand jour. Les règles de fonctionnement adoptées lors de la création de l’euro et validées par les états de la zone peuvent à tout moment être transgressées par chacun d’eux si les élections en décident ainsi. Nous le savons bien ici en France. Le gouvernement économique qui devait suivre la monnaie commune n’est jamais venu. Et il semble bien tard maintenant pour réussir cet exploit.
L’euro ne pourra pourtant tenir que si les chefs d’Etat de la zone euro s’obligent solidairement à construire un certain fédéralisme politique validé par les citoyens.
On peut comprendre que conscients de cela, certains dirigeants puissent souhaiter faire sortir la Grèce de l’Euro pour envoyer un message de ressaisissement aux gouvernements et aux peuples de la zone. Un drame tout de suite pour tenter d’éviter la dislocation inévitable de l’euro. Le vote d’ici le 15 juillet du programme de réforme à l’opposé de la volonté majoritaire en Grèce relève de cette même stratégie. Sauf que l’on ne saura que plus tard si les grecs sont capables de l’appliquer tant leur Etat est défaillant.
Le respect de la volonté démocratique des grecs nécessite à mon sens qu’ils quittent l’euro et que leur nouvelle monnaie nationale soit en cohérence avec leur choix politique. Les conditions ne sont pas réunies pour faire marche arrière. Faire dire et faire le contraire absolu de ce que le peuple a démocratiquement choisi conduira à un échec de plus.
Il semble que la nuit dernière Angela, François et Alexis ont ébauché une sorte de compromis pour se sortir de l’inextricable. Puissent-ils encore nous surprendre et réussir ?
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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