9 Mars 2014
La presse, dans un réflexe pavlovien quasi unanime, a titré cette fin de semaine dans le sillage du Monde des trucs du genre (CL) : « Sarkozy au cœur d’une affaire de trafic d’influence ». Et pour parfaire l’info-condamnation qui a pris le pas totalitaire sur la présomption d’innocence, un deuxième délit a été adossé au premier, la violation du secret de l’instruction. Trafic, violation, voilà un vocabulaire qui fait froid dans le dos, pas vrai mes honnêtes lecteurs? On imagine sans effort la voyousserie de l’auteur du crime. Pas besoin de lui faire un procès. Le lynchage médiatique immédiat est pleinement justifié. Gagnons du temps avec ce présumé coupable, nous n’en avons que déjà trop perdu, ont semblé nous dire en chœur les petits juges informateurs du bon peuple.
Depuis le temps que la rumeur enfle et qu’aucun magistrat n’arrive à le coincer, cette fois ci semble être enfin la bonne. Parce que la justice est en possession d’écoutes téléphoniques probantes à faire pâlir de jalousie la NSA.
Moi, vous le savez mes chers lecteurs, c’est par le journal que j’apprends les nouvelles. Alors forcément je ne m’arrête pas aux titres qui font mal. Je lis les longs développements quand ils existent. Et là, au fil de mes lectures, c’est une tout autre perspective de l’affaire qui m’est apparue. Pour vous faire gagner du temps, je vous suggère d’aller directement à la deuxième page du JDD de ce jour. Tout y est très bien raconté.
Ça se lit comme un polar. On y apprend comment les grandes oreilles ont compris que le suspect se doutait de quelque chose. Comment elles ont deviné qu’il y avait un autre téléphone inconnu d’eux. Et comment ils ont passé au crible les appels qui ont suivi celui de NS sur la borne du Cap Nègre pour identifier le portable du cachotier. Au passage mes chers lecteurs, plein de gens comme vous et moi ont été audités systématiquement pour trouver l’aiguille dans la botte de foin. Ne cherchez pas trace dans vous journaux de la moindre inquiétude de la légalité des écoutes qu’il a fallu faire pour trouver le portable inconnu, vous n’en trouverez pas. J’ai vérifié. C’est si peu de chose quand on traque un voyou du calibre de NS.
En fait, tout est parti de l’information selon laquelle NS aurait touché des sous du colonel Kadhafi pour financer sa campagne électorale. Les comptes ont été épluchés dans tous les sens y compris côté fournisseurs pour voir si du liquide aurait été versé en plus des factures. Pas un centime n’a été suspecté. Pas trace des 50 millions annoncés pour une campagne qui en a coûté 20. Qu’à cela ne tienne, les écoutes ont continué. Ça fait presque un an maintenant. Et qu’est ce qui a été entendu de délictuel qui justifie tout le barouf de ces derniers jours ? Son avocat était informé des avancées du dossier de son client par un haut magistrat de la cour de cassation qui en contrepartie aurait demandé à bénéficier de l’influence de l’ancien président pour avoir un poste à Monaco. Voilà la violation du secret de l’instruction et le trafic d’influence.
Le bâtonnier de Paris passablement remonté balaie l’accusation en rappelant que c’est une pratique courante que de parler du déroulement d’un dossier sans que cela puisse avoir la moindre influence sur une décision collégiale de magistrats de la Cour de Cassation. Quand au trafic d’influence caractérisé par une demande de soutien auprès de Monaco pour un poste qui a été attribué à un autre, s’il justifie une instruction, ce sont tous les politiques qu’il faut mettre sur écoute. Parce qu’ils passent leur temps à recevoir des demandes de ce type qui sont, ou pas, suivies d’effets et dont la contrepartie attendue c’est d’avoir un vote de plus.
On apprend à la fin de l’édito de Bruno Jeudy dans le même JDD que François Hollande aurait rassuré récemment des jeunes parlementaires socialistes sur Sarkozy en leur déclarant : « Ne vous inquiétez pas. Je le surveille. Je sais exactement ce qu’il fait. »
Un avocat écouté quand il parle à son client pour d’aussi légers motifs, un ancien président écouté depuis près d’un an par un ou plusieurs flics à plein temps et dont la retranscription des échanges avec tous ses interlocuteurs se retrouve sans doute en très haut lieu, tout ça sent bien l’affaire d’Etat en effet. Mais pas celle annoncée un peu vite par la presse.
Compte tenu des moyens déployés pour le traquer et si comme je le pense Nicolas Sarkozy surmonte une fois de plus l’épreuve, les journaux pourront compter encore longtemps sur lui pour développer leurs ventes.
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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