1 Avril 2012
Ce matin encore j’ai pris la route en demandant à mon GPS de me conduire à travers la circonscription par le chemin le plus court. J’emprunte ainsi les routes les plus improbables, parfois mêmes des chemins de terre, pour me rendre à la mairie ou au clocher de ma destination.
Aujourd’hui, c’était jour de grande foire des rameaux et des cornuelles à Villebois Lavalette. Une nouvelle occasion pour voir du monde au bric-à-brac du matin. L’opportunité aussi de constater par moi-même les très longues files d’attente chez les deux heureux boulangers pâtissiers en charge de délivrer la précieuse pâte sablée près des halles rénovées.
C’est justement sous ces magnifiques halles qui ne lassent de m’étonner que j’ai croisé le maire. Patrick était là dès cinq heures ce matin, avec son équipe de bénévoles, pour que tout soit prêt pour accueillir les chineurs, les promeneurs et les paroissiens. Il s’est accordé un moment de répit pour boire un café et échanger avec moi sur son engagement pour mettre en œuvre tout ce qui doit assurer le développement et l’attractivité de sa commune. Une fois de plus je vérifie à Villebois Lavalette que, malgré la rudesse des temps, une vision, des projets, l’animation d’une équipe et beaucoup de travail quotidien font merveille.
Permettre le développement d’activités pour que se crée de l’emploi. Révéler le potentiel de nos territoires en s’ouvrant sur le monde. Partout où je ressens ces mouvements, on trouve les mêmes ingrédients du succès, de l’envie, du plaisir, de la créativité, de la bienveillance pour les autres, du métissage culturel et surtout beaucoup de travail et la foi du charbonnier.
Il me faudrait des heures pour raconter la richesse des mes rencontres entre Cognaçais et Montmorélien de ces derniers jours. La beauté des paysages de notre territoire, la chaleur et la qualité de mes rencontres renforcent chaque jour un peu plus ma motivation.
Les difficultés à surmonter par mes interlocuteurs sont pourtant légion. Mais chacune peut trouver une solution si peu que l’on accorde un peu d’attention aux intuitions simples plutôt qu’aux parti-pris dogmatiques venus d’on ne sait où. Alors que la sécheresse menace cette année encore, comment imaginer que la constitution de réserves alimentées en hiver fasse encore débat. Alors que la préservation de notre niveau de vie nécessite plus d’efficacité de l’action publique, comment accepter qu’il faille sacrifier à autant de procédures mal dosées en matière de documents d’urbanisme. C’est sur le terrain qu’il faut entendre les objections, les lever une à une quand c’est possible, mais le plus souvent en tenir compte avec pragmatisme.
Presque dans chaque commune où je passe, j’établis une connexion avec quelqu'un que je connais où une expérience vécue. Ainsi, c’est en pensant aux mots qui me manquent pour vous décrire la beauté des paysages que je traverse que je me suis souvenu de ce célèbre arboriculteur pied noir et poète du Montmorélien que j’avais entrevu quand il venait voir mon père dans les années 80. C’est après avoir lu un poème intitulé Golden de l’Angoumois et quand François Mitterrand s’est intéressé à lui que j’ai compris qu’il n’était pas seulement un producteur de pommes. J’ai retrouvé un autre poème de lui qui traduit si bien ce coin de France que je vous l’ai retapé pour vous en offrir la lecture.
A Saint Laurent-de-Belzagot
Le temps s’est arrêté aux portes du village
Sur les coteaux de Saint Laurent-de-Belzagot
Les jardins endormis ont un air andalou
Branches de grenadiers par-dessus les enclos
Aux porches arrondis des souvenirs mauresques
Voici le géranium et le pied de glycine
Et le figuier noueux tout au long des vieux murs
Qui penchent de partout dans les rues « serpentines »
Flanquées de volet clos qui n’ont plus de couleurs
Sur les hauteurs de Saint Laurent-de-Belzagot
Le temps s’est arrêté aux portes de chez nous
Les jardins endormis ont un air andalou
Sur les hauteurs de Saint Laurent-de-Belzagot
On voit dans les lointains des trains qui se faufilent
Et aussi des camions comme des mouches folles
Et des autos pressées qui perdent la boussole
Dans les chemins nouveaux qui sentent le pétrole
Et puis vient le silence ami de l’écritoire
Poète j’aime à flâner sur ce haut promenoir
Heureux de savourer mon petit coin de France
C’est la Charente en camaïeu de « verdoyance »
Avec ce rien de brume aux frontières des choses
Naïf comme un pinceau d’Antoinette Dumas
Le temps s’est arrêté aux portes de chez nous
Les jardins endormis ont un air andalou
Des forêts, des maisons, des vignes, des clochers
Un noyer isolé, un pommier dans un pré
Une vache qui broute entre deux carillons
Et la Tude qui coule entre deux peupliers
Et le jour qui s’en va au rythme des cagouilles…
On peut marcher dans ses sabots et aller loin !
Tout est simple et profond comme les gens d’ici
Mille ans de poésie sur mémoire de France
C’est la Charente en camaïeu de « verdoyance »
Avec ce rien de brume aux frontières des choses
Naïf comme un pinceau d’Antoinette Dumas
Le temps s’est arrêté aux portes de chez nous
Les jardins endormis ont un air andalou
J’avais une bonne amie dans ce petit hameau
Antoinette Dumas notre douanier Rousseau
Je dépose ces vers à la maison d’argile
Pétrie d’éternité où elle dort maintenant…
Le temps s’est arrêté aux portes du village
Sur les coteaux de Saint Laurent-de-Belzagot
Marcel Albérola-Rèche
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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