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Question de méthode.

« La dictature c’est ferme ta gueule et la démocratie c’est cause toujours ». J’ai une nouvelle fois recours à Woody Allen, qui a décidément le sens de la formule, pour illustrer la surdité hautaine des dirigeants, bien trop fréquente dans un cadre où elle ne devrait pas avoir sa place. Et pourtant, à chaque fois que l’adhésion est nécessaire à la réussite d’un projet, il se vérifie que cette attitude pénalise fortement les résultats escomptés quand elle ne conduit pas tout bonnement au désastre. L’actualité locale et nationale nous offre concrètement deux exemples des conséquences douloureuses qui résultent de l’exercice de ce mode de pouvoir. On n’en serait sans doute pas là s’il fallait passer un examen pour pouvoir diriger des communautés d’hommes et de femmes tant sont connues les méthodes qui permettent de réussir. Le Figaro magazine de ce week-end consacre un dossier à « comment faire bouger la France » dans lequel témoignent plusieurs intellectuels. Parmi ceux ci, Michel Crozier, sociologue auteur de nombreux ouvrages depuis quarante ans sur ce vaste programme, me semble apporter une contribution particulièrement intéressante.

Je le cite : « nos dirigeants font toujours les mêmes erreurs ; ils ne travaillent pas sérieusement, ils s’embarquent, ils n’écoutent personne, et ils s’étonnent des réactions ». Il poursuit par l’évocation de deux réformes importantes auxquelles il a participé qui ont débouché sur des avancées significatives, à la SNCF et à Air France en disant ceci : « ce qui m’autorise à en conclure qu’il s’agit avant tout d’une question de méthode : dans les deux cas nous avons commencé par écouter les gens, et dans les deux cas, ils se sont montrés extraordinairement coopératifs. Nous sommes parvenus à orienter les réformes dans une toute autre direction et à proposer des changements très importants qui sont passés sans aucun problème, alors qu’auparavant on aurait eu peur simplement d’en parler. L’écoute, tout est là. Mais pas celle des sondages : une écoute empathique, profonde. »  Il se trouve que j’ai reçu la visite il y a deux ans de Christian Blanc qui a dirigé le redressement d’Air France et qui incarne ce management efficace et éclairé. C’est quoi la méthode Blanc lui avais je demandé. Sa réponse a été à peu près celle là : « j’ai pas vraiment de méthode, je vais à la rencontre des gens, des équipes, j’écoute beaucoup et puis quand la voie me semble bien définie j’avance et je vais au bout.. ». Il personnifie bien à mon sens comme le stipule une note biographique « la raison et la rigueur dans l’analyse, l’audace réfléchie dans la proposition, l’ambition collective dans le projet et le courage dans l’action ». Il dépasse les clivages partisans pour n’être guidé, il me semble, que par le service de l’intérêt général. Ce qu’il a réussi en témoigne, des Accords de Matignon sur la Nouvelle Calédonie au projet d’entreprise pour Air France. Nous avons vraiment beaucoup à apprendre de lui pour l'action publique. Au passage, je viens de commencer la lecture de son dernier livre : « la croissance ou le chaos »  dont je reparlerai peut-être ici.

Pour ce qui concerne la conduite de projets j’ai aussi toujours présent à l’esprit la journée passée avec des collègues entrepreneurs à écouter un Québécois Gilles Charest nous former à la gestion par le consentement. Ses conseils sont d’une redoutable simplicité. Il nous propose de ne pas essayer de convaincre notre entourage ou nos collaborateurs de nos bonnes idées, ni de leur imposer notre façon d’agir, mais de leur faire des propositions en leur expliquant les raisons qui les motivent. Par la suite il nous incite à recueillir leurs objections et à prendre la peine de les accueillir pour en apprécier la valeur. S’il n’y a pas accord sur la proposition il est préférable de retarder notre action et de réfléchir aux arguments de l’autre pour essayer de bonifier la proposition à la lumière de ses objections. La gestion par consentement parce qu’elle force la reconnaissance des besoins et de la réalité de l’autre améliore le fonctionnement des organisations mais aussi tout simplement la capacité de vivre et de travailler ensemble des individus. Je sais surtout par expérience, et c’est sans doute pourquoi nous en sommes encore bien loin dans de nombreuses situations, que ce n’est pas une recette simple qu’il suffirait d’appliquer consciencieusement pour réussir mais bien l’expression vraie d’une attention et d’un respect profond ressenti à l’égard des autres.

Voilà qui peut constituer pour nous tous, je l’espère, un bon viatique pour la semaine qui commence.

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À propos

Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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D
L'individu de sexe masculin qui signe "nano" ne serait-il pas un ancien ébéniste spécialiste de la chaise à porteurs?????<br /> Ayant capitalisé toutes ces années du matériel humoristique façon: ciseau à bois - "oua-oua"!!!<br /> <br /> Punaise, j'en rigole encore!!!
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D
Ah! Tiens, toi aussi tu as le site d'Evene en lien!<br /> <br /> Que le monde est petit!<br /> <br /> Bon, je vérifie ton information...
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I
Ca serait pas plutôt de Jean-Louis Barrault?http://www.evene.fr/celebre/biographie/jean-louis-barrault-153.php
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D
J'ai déjà dit que le recours à la citation était ici un peu exagéré!<br /> Et dangereux!<br /> <br /> C'est pas Woody Allen l'auteur de celle ci-dessus, c'est Coluche!!!<br /> <br /> L'un et l'autre étant cependant gens intéressants...
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D
Cette citation est attribuée à Woody Allen sur le site http://och.free.fr.citations.CitationsVousetMoi.htm.
R
Je trouve très interessant l'exposé sur la méthode, mais comme de nombreux autotochtones, je m'interroge sur le fond de tout ça (bien entendu, connaissant mon président et ses "accointances"...je devine !)<br /> Mais ne serait-il pas opportun de rentrer un peu dans le débat (le national), quand on a vu les jeunes du lycée de Barbezieux à la pointe de l'engagement ?  En allant embaucher cette après-midi j'ai eu la joie de recevoir une petite fleur de leur part, ils arrêtaient les automobilistes au rond point de la poste, sympathique initiative pour ces premiers beaux jours !<br /> Je me souviens d'une des dernières fois où l'on m'avavit arrêté pour me faire un cadeau: c'était en 95, un feu rouge porte d'Italie...et c'était une belle pomme que m'offrait un jeune homme, pleine de promesses... Belle symbolique que ce fruit, maintenant plein du vide que les vers y ont fait...
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