Lors de sa venue en juin à La Rochefoucauld, pendant la campagne électorale, Dominique Bussereau le secrétaire d’Etat chargé des transports nous avait agréablement
surpris en se montrant très ouvert à des solutions innovantes pour adapter les infrastructures routières dans notre département aux réalités du trafic constaté. Il avait pris le risque d’évoquer,
sans avoir consulté ses services, la création d’une autoroute concédée dans l’est de la Charente mais également des péages adaptés pour faire supporter au fret transporté une partie de la charge
d’investissement et d’entretien des routes utilisées. J’ai fait partie de ceux qui ont cru à cet instant à de nouvelles perspectives enthousiasmantes pour la Charente. Je suis redevenu plus
inquiet après avoir lu le courrier que le secrétaire d’Etat a adressé au sénateur Henri De Richemont le 2 août et dont la presse s’est fait l’écho il y a quelques jours. Pour la RN10 les termes
employés sont les suivants : « l’aménagement de la section Reignac Chevanceaux figurera parmi les opérations à financer en priorité dans le cadre des prochains programmes de
développement et de modernisation des itinéraires du réseau routier national qui doivent prendre le relais des volets routiers des contrats Etat-régions ». Pour la RN141 une réunion est
prévue au début du mois de septembre à laquelle il convie les deux préfets de Région (Poitou-Charentes et Limousin) ainsi que le préfet de la Charente afin d’envisager les mesures propres à
corriger les effets de l’arrêté pris par la présidente du conseil général de la Haute Vienne qui interdit aux poids lourds de circuler dans un sens sur la RD951, transférant ainsi le trafic sur
la RN141. Ce report des poids lourds aggrave encore la situation pour les bourgs traversés comme Chabanais. Le secrétaire d’Etat ajoute à la fin de sa lettre qu’il a par ailleurs demandé à ses
services « d’étudier la possibilité d’accélérer le processus de la réalisation de la déviation de Chabanais ».
Avec un peu de chance on évitera donc peut-être de justesse que le pont sur la Vienne ne s’effondre avant que la déviation ait été réalisée. Et pour ce qui concerne
la RN10 (Reignac Chevanceaux et ses près de 20000 véhicules jours dont la moitié de poids lourds) le secrétaire d’Etat parle de contrat PDMI. Jusqu’à preuve du contraire quand on veut payer seul
on n’a pas besoin de contrat. Cette référence n’annonce donc rien de bon quant aux financements envisagés pour ce tronçon. Après 2011 pour l’ouverture à la circulation au nord de Barbezieux ce
sera sans doute 2015 ou 2017 pour Reignac Chevanceaux.
Rien dans ce courrier n’évoque la situation exceptionnelle du trafic poids lourds en Charente que la géographie situe sur l’axe le plus pertinent (plus court, plus
plat) pour relier l’Europe du Sud à l’Europe de l’est. Rien n’exprime que face à cette situation exceptionnelle il faut des moyens et des solutions rapides et exceptionnelles. Plus aucune
référence n’est faite dans ce courrier à la création d’une autoroute concédée entre Roumazières Bellac et La Croisière (La Croisière se situe à 47 kms au nord de Limoges sur l’autoroute A20 à
l’intersection avec la RCEA route centre Europe Atlantique) ni aux solutions de péages poids lourds expérimentées en Alsace, en Suisse ou en Allemagne. Plus aucune référence non plus aux immenses
dangers liés à l’absence injustifiable de parkings adaptés tout au long de l’itinéraire emprunté par les camions.
Hier dans la Charente Libre Richard Tallet a opportunément remis le sujet du péage des poids lourds dans le débat concernant l’amélioration du réseau routier
charentais. A la lecture de cet article et des points de vue qui y sont relatés on perçoit bien aussi nos ambiguïtés charentaises. Plutôt que d’accepter la réalité de notre situation et d’en
faire un atout fort de notre développement nous semblons préférer des demi-mesures de bricolage pour se tirer d’affaire chacun de notre côté tout en espérant encore qu’il soit possible
d’interdire aux importuns de venir nous pourrir la vie. Cette absence de vision stratégique qui nous a fait perdre le bénéfice de l’autoroute dans les années 70 perdure encore aujourd’hui.
Etonnante fatalité acceptée.