On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre et on n’attire pas plus les électeurs avec une augmentation de la TVA sur ce qu’ils consomment. La majorer pour qu’elle
devienne enfin TVA sociale pousse l’antilogie un peu trop loin pour ne pas être perçue comme telle. De plus les économistes entre eux sont encore loin d’avoir clos le débat sur l’efficacité
économique du transfert d’une partie du coût de la protection sociale, de la rémunération du salarié vers la taxe sur la valeur ajoutée payée par les consommateurs sur les produits qu’ils
achètent.
Pourtant l’analyse qui motive ce transfert semble limpide. Le coût du travail dans notre pays est tel qu’il est responsable du prix de revient trop élevé des biens
et des services que nous produisons. Compte tenu de la liberté des échanges avec le reste du monde nous trouvons sur le marché des produits de diverses origines moins chers que ceux produits en
France. En achetant moins cher nous fermons nos usines devenues moins compétitives qui, quand elles le peuvent, se délocalisent à l’étranger. Le chômage qui en résulte génère un nouveau coût pour
la collectivité, sans contrepartie, qui se répercute sur la production et les services encore compétitifs mais qui se trouvent à leur tour pénalisés par cette nouvelle charge qui compromet aussi
leur pérennité.
Pour mettre un terme à ce cercle vicieux il est tentant d’instituer des droits de douane pour renchérir les importations. Mais c’est interdit par Bruxelles et par
les accords à l’OMC. En revanche il demeure possible de faire jouer ce rôle à la TVA dont le taux peut être porté jusqu’à une limite de 25 % conformément à la réglementation européenne. C’est
d’ailleurs le taux au Danemark que l’on prend souvent en exemple ces temps ci. Le consommateur paie donc plus cher ce qu’il achète que cela provienne de France ou d’ailleurs et le surplus
d’argent collecté permet d’alimenter les caisses de notre couverture sociale. Ces montants collectés sont autant de moins à appeler auprès des salariés et de leurs employeurs, ce qui permet
d’abaisser le prix de revient de ce qui est produit en France. Par cette modification des circuits de collecte d’une partie du coût de la protection sociale la compétitivité des produits français
à l’export s’améliore (ils sont vendus hors taxes), les produits et les services français qui comprennent une part importante de main d’œuvre baissent un peu ou n’augmentent pas malgré la hausse
de la TVA alors que les produits importés augmentent. L’augmentation de la TVA devient donc un frein à la perte de compétitivité des produits français consommés en France comparativement à ceux
d’origine étrangère.
Compte tenu de la forte concurrence sur les marchés il est attendu que les entreprises répercutent la baisse de leur prix de revient limitant ainsi l’inflation qui
devrait logiquement accompagner la hausse de la TVA.
Dit comme ça la TVA droit de douane (plutôt que sociale) a du charme et on peut comprendre qu’elle ait séduit plus d’un politique. Il faut se rappeler que c’est
plutôt une idée née à gauche et au centre. Jean Arthuis soutien de François Bayrou et sénateur est l’auteur d’un rapport sur cette idée de TVA « sociale » qui peut être téléchargé sur
le site du Sénat.
En revanche les libéraux, dont je fais partie, n’y croient pas beaucoup. Quels sont leurs arguments. Tout d’abord ils précisent que l’expression qui stipule que
grâce à cette taxe ce sont les importations qui vont payer la couverture sociale est fausse. Ce sont bien les consommateurs qui vont payer la protection sociale. D’autre part le gain de
compétitivité sur les produits exportés sera trompeur parce qu’il sera en fait financé par le consommateur. Pour le dire d’une autre façon on cherche à s’élever dans les airs en se tirant par les
cheveux. En fait très globalement la compétitivité du pays France ne se trouve pas modifiée par ce jeu de vases communicants puisque les dépenses et les recettes demeurent les mêmes. De même que
le pouvoir d’achat des français reste inchangé sauf si les exportations devaient augmenter compte tenu d’une fausse compétitivité accrue. Les prix de revient anormalement bas seraient en effet
dus à la prise en charge par le consommateur d’une partie du coût de revient. Ce qui diminuerait son pouvoir d’achat ou devrait renchérir d’une façon ou d’une autre les coûts de production. En
fait cette hausse de la TVA ressemble à une ligne Maginot inefficace qui ne freinera pas beaucoup la progression de l’entrée des produits étrangers sur notre sol pas plus qu’elle n’empêchera les
délocalisations. En fait c’est une démarche qui diffère les efforts à réaliser en matière de formation, de marché du travail, de recherche et d’innovation tout autant que de réforme de l’Etat
pour plus d’efficacité à un moindre coût. Qu’en pensez vous ?