L’onde de choc de la défaite de la droite sur la deuxième circonscription de Cognac n’a pas fini de se faire ressentir dans les rangs des perdants. La confusion
règne et chacun rejette sur l’autre la responsabilité de l’échec. Quand une victoire en politique gomme trop facilement les imperfections des parcours et des méthodes l’échec au contraire les
mets en exergue. L’épreuve de la perte des élections est aussi un puissant révélateur du caractère des candidats et de leurs soutiens.
J’ai lu attentivement les commentaires laissés sur mon blog et sur d’autres et j’ai suivi les déclarations des protagonistes relatées par la presse toute cette
semaine et encore aujourd’hui.
Claude dans son dernier commentaire s’étonne que toute cette actualité m’ait laissé aussi muet depuis quelques jours. Bien que le clavier m’ait souvent
démangé j’ai en effet préféré prendre du temps pour écrire un article plus distancié.
J’ai adhéré à Démocratie libérale en 1995 dans les jours qui ont suivi l’élection présidentielle. En 2002 l’UDF (moins Bayrou et quelques autres), DL et le RPR se
sont dissous pour constituer l’UMP et j’en suis alors devenu membre. Comme tous les partis celui-ci a des statuts et un règlement intérieur. Je m’y conforme. Je sais que les règles ne sont pas
immuables et que comme chaque membre j’ai un rôle à jouer pour les faire évoluer. Je sais aussi que j’ai la liberté de rendre ma carte à tout moment si je refuse les décisions prises.
Un parti (je suppose qu’il doit en être ainsi dans les autres aussi) est un lieu bien étrange. S’y trouvent réunies des personnes très différentes les unes des
autres avec des motivations et des idées plus différentes encore. C’est imparfait, éprouvant, déroutant, déconcertant, étonnant, épuisant, mais c’est passionnant et fabuleux parce que c’est à
l’image des hommes et des femmes du pays et parce que c’est là que s’organisent les groupes d’individus qui projettent en démocratie d’assumer la responsabilité de diriger la nation.
L’UMP a donné l’investiture à Jérôme Mouhot, le maire de Cognac, pour les élections législatives et j’ai dit ici que membre de ce parti je devais voter
pour lui. Mais dans notre démocratie fort heureusement il n’est nul besoin d’être investi par un parti pour se présenter devant les électeurs. C’est le choix qui a été fait en toute légitimité
par Bertrand Sourisseau parce qu’il considérait qu’il pouvait réunir sur son nom plus d’électeurs que le candidat investi par Paris. En revanche il me semble que la modernisation de la vie
politique dont on me rebat les oreilles commence par le respect des règles et des engagements. Il aurait donc du rendre sa carte du parti (avant de se la faire retirer) pour ne pas transgresser
l’obligation, à laquelle consent tout adhérent, de ne pas se présenter contre le candidat investi. Mais dans ce registre le record du mauvais exemple est venu de Jacques Bobe, le député sortant
qui a occupé la fonction de secrétaire départemental du parti et qui en est toujours membre. Il n’a pas craint de semer la confusion dans la tête des électeurs en faisant campagne ostensiblement
pour Bertrand, écrivant un mot de soutien sur sa profession de foi et n’appelant pas à voter pour Jérôme Mouhot le soir du premier tour. C’est de mon point de vue la deuxième erreur déontologique
de Bertrand. Il aurait du refuser tout net ce soutien encombrant qui a perdu toute crédibilité et qui s’est révélé très néfaste pour son image. Les très mauvais résultats qu’il a obtenus sur le
canton de Chateauneuf en témoignent cruellement.
Je ne sais pas si les résultats du premier et du deuxième tour auraient pu être très différents si les règles du parti avaient été clairement respectées mais les
lendemains de défaite seraient sans doute moins délétères pour tout le monde. La crédibilité des hommes politiques n’aurait pas été une nouvelle fois inutilement très dépréciée. Etre exigeant sur
le respect des règles élève le politique qui s’y astreint tout en renforçant la démocratie et le débat politique. Nulle urgence ne permettait de croire cette fois ci encore que la fin justifie
les moyens. Il n’est peut-être pas plus facile de gagner (quoique) en respectant les règles mais quand on perd on perd moins et moins longtemps.
Et maintenant. Il me semble qu’en matière de règles et de méthode le maire de Cognac est bien hésitant depuis le début de la semaine. C’est pourtant dans ces moments
là qu’il faut assumer clairement et vite sa responsabilité politique. Si j’ai bien compris Jérôme souhaitait un vote de confiance à main levée en séance publique. L’objectif était de faire
exprimer à Bertrand Sourisseau et à certains autres conseillers municipaux leur confiance ou leur défiance. En cas de confiance l’équipe municipale était en mesure de conduire les affaires de la
ville jusqu’en mars 2008 en conservant la répartition des responsabilités et des délégations existantes. En cas de défiance le maire devait alors en tirer les conséquences et faire
entériner par le conseil municipal une nouvelle organisation. En clair ou Bertrand soutient son maire et il devient délicat pour lui d’expliquer à la population l’an prochain qu’il se présente
contre lui sans aboutir à faire élire à coup sûr Michel Gourinchas; ou bien il ne le soutient pas et les responsabilités qu’il occupe peuvent lui être retirées par le conseil municipal à la
demande du maire. En revanche sa légitimité pour concourir à la place de maire devient immédiatement évidente et cohérente avec la compétition de ces dernières semaines. Mais cette stratégie
n’est semble t’il déjà plus d’actualité. A moins que la réunion à huis clos du groupe majoritaire du conseil municipal qui est annoncée en remplacement ait le même objectif. Il me semble que pour
le bien de la collectivité et de ses habitants et pour que le gagnant des élections de 2008 ne soit pas forcément Michel Gourinchas il faut que chacun assume clairement ses choix et ses
responsabilités.
Pour ce qui concerne le maire c’est sans doute en ce moment que se joue sa réélection. Ses électeurs sont encore plus attentifs à sa maîtrise de la situation depuis
l’issue du deuxième tour et la victoire de Marie Line Reynaud.
Tout ces raisonnements peuvent paraître bien compliqués et inutiles à tous ceux qui pensent comme je l’ai lu ici où là que le candidat d’évidence était et sera
Bertrand et que tout autre point de vue plus nuancé témoigne d’une imbécillité crasse. La nécessité de rassembler tout son camp pour gagner, le comportement peu ragoutant de Jacques Bobe et les
résultats du premier tour devraient pourtant les inciter à plus de finesse et de modestie. Loin de diminuer les disfonctionnements, les pesanteurs et l’immobilisme qu’ils dénoncent, ils
contribuent bien plus surement à les aggraver durablement en croyant s’affranchir des contingences.
Les jours qui viennent seront riches d’enseignements pour la suite et le pire n’est jamais sûr.