C’est presque devenu une chronique quotidienne. Hier encore la route, la RN 141, était à l’horreur dans la Charente Libre.
L’association « Grain de sable » qui défend les riverains de cette route a réussi une opération escargot surprise de deux heure trente entre Etagnac et Chabannais qui a provoqué quatre
ou cinq kilomètres de bouchons. Depuis l’arrêté de la présidente du conseil général de la Haute-Vienne interdisant les camions de plus de 19 tonnes sur la RD 951 dans le sens Bellac – Confolens
le trafic qui s’élève à 2200 poids lourds en moyenne chaque jour s’est reporté sur la RN 141. Philippe Pringault, le président de « Grain de sable » souhaitait par cette initiative
attirer une nouvelle fois l’attention des pouvoirs publics sur l’enfer quotidien que vivent les habitants de Chabannais.
Depuis quelques jours, campagne électorale pour les législatives oblige, la route est au cœur du débat public. La population et les
associations sollicitent les candidats sur leur appréciation de la situation et sur le rôle qu’ils pourraient avoir pour améliorer la situation.
Tout récemment aussi Benoît Delatte qui préside l’association Entreprendre en Sud Chatrente, Daniel Herbreteau et moi-même avons été
reçu par le préfet en présence du directeur départemental de l’équipement. Ils nous ont fait part tous deux de l’échéancier prévisionnel d’aménagement par l’Etat de la RN10 et de la RN
141.
Que peut-on dire à ce jour de la position affichée des uns et des autres?
Pour ce qui concerne l’Etat les perspectives sont les suivantes. La fin de la mise à deux fois deux voies de la RN10 au nord de
Barbezieux est pour 2009, les financements sont acquis. Juste après l’Etat fera son affaire de la mise à deux fois deux voies entre Reignac et Chevanceaux, ce qui permet d’envisager dans le
meilleur des cas une mise en service en 2014 ou 2015. Il faut donc attendre 7 à 8 ans de plus et supporter un trafic de poids lourds qui aura progressé significativement d’ici là dans les très
mauvaises conditions que l’on sait. Pour ce qui concerne le flux de poids lourds en croissance constante qui se dirige vers l’est après Angoulême l’Etat considère qu’il ne peut pas y avoir
d’autre solution que de le faire passer par Limoges. La création d’une liaison autoroutière entre Roumazières et La Croisière, compte tenu des chiffres de trafic dont il dispose, lui paraît
parfaitement impossible parce qu’elle n’intéressera aucun concessionnaire sans addition de beaucoup d’argent public qu’il faut prioritairement affecter à la RN 141. L’échéance pour l’achèvement
de la mise à deux fois deux voies de la RN 141 sur tout le tracé entre Angoulême et Limoges semble à ce jour impossible à prévoir. On peut cependant évoquer sans risque d’être démenti au moins
2025.
Du côté des candidats à la députation il est à noter la position de Malek Boutih candidat sur la 4ème rapportée par la
presse qui consiste tout bonnement à demander l’interdiction du passage des camions en Charente pour les obliger à emprunter l’autoroute A10 ou l’A89.
Bertrand Sourisseau reprend quant à lui l’action de Jacques Bobe qui consiste à demander à l’Etat d’achever au plus vite la mise à deux
fois deux voies de la RN 10 au nord puis au sud de Barbezieux. Pour ce qui concerne la RN 141 c’est bien entendu entre Cognac et Saintes qu’elle est ressentie prioritaire. Une autoroute pourquoi
pas mais plus tard et on ne sait pas très bien où.
Jérôme Mouhot reprend sur son blog en partie nos propositions de transformation sur place en autoroute concédée pour la RN 10 avec
péage pour le fret en transit mais sans qu’il apparaisse clairement ce qu’il faut faire après Angoulême vers l’est. En revanche pour lui aussi la RN141 entre Cognac et Saintes est une
priorité.
Je ne connais pas la position des autres candidats sur cette question. En ont-ils une ? Je ne sais pas et en tous cas il ne me
semble pas qu’il y ait eu de trace écrite à laquelle il pourrait être fait référence.
Grace au travail de l’association Axe Nantes Méditerranée et à celui de la communauté de communes des 3B associée à Entreprendre en Sud
Charente richement documenté et très bien conseillé par Daniel Herbreteau, argumentaires et références pertinentes ont pourtant été diffusés auprès de tous les décideurs actuels et futurs
importants.
Ce qui me frappe le plus c’est qu’à ce jour personne parmi les responsables de l’Etat, les élus du département ou parmi les candidats
aux élections législatives n’a repris le constat fondamental qui détermine les choix à opérer. Ce constat c’est que la Charente est traversée du sud vers l’est par un gigantesque corridor de fret
européen de poids lourds toujours en croissance. Et ceci parce qu’elle est située sur l’axe géographique idéal et presque incontournable pour relier la péninsule ibérique et l’est de l’Europe.
Personne ne défend l’idée que c’est une chance pour notre département et son développement économique d’être situé sur un tel axe. Personne ne dit haut et fort que cette situation nécessite une
autoroute sans interruption pour relier la péninsule ibérique à l’est de l’Europe. Personne n’évoque le scandale de l’insécurité liée aux conditions dans lesquelles on accepte un tel trafic de
poids lourds en Charente sans aires de stationnement publiques adaptées. Personne ne dit que sur ce trajet il n’y aura bientôt plus que la Charente à ne pas disposer d’une autoroute adaptée et à
n’offrir que des routes d’un autre âge avec des tronçons encore à deux voies.
Ce n’est qu’après avoir compris pourquoi un si grand nombre de poids lourds doit traverser la Charente du Sud vers l’est que l’on peut
réfléchir lucidement à l’amélioration des routes en Charente. Et bien ce préalable en mai 2007 n’est toujours pas acquis. Le département de la Charente se trouve dans cette situation
abracadabrantesque de bénéficier du trafic de fret longue distance peut-être le plus important d’Europe et d’être le dernier département de France sans un seul kilomètre d’autoroute sans qu’aucun
élu d’importance du département ne s’en offusque ou ait envie de réparer cette aberration. Je n’ai entendu personne mettre en perspective nationale et européenne la situation du trafic routier
dans notre département. Depuis quelques temps j’ai acquis la conviction que la solution évidente de l’autoroute nous sera proposée et imposée de l’extérieur tant la nécessité sera
incontournable vue d’ailleurs et tant l’inertie des élus et des représentants de l’Etat continuera d’être atrocement exemplaire dans le département. Ce n’est qu’en prenant de la hauteur et en
essayant de comprendre pourquoi notre département est le lieu de passage d’un tel trafic que des objectifs adaptés peuvent être définis. D’un côté le choix politique de l’autoroute A10 et A89
provoque une mobilisation de tous les instants de l’administration des routes pour masquer les erreurs de tracé et de priorité que l’examen objectif de la situation en Charente mettrait trop
crument en évidence. De l’autre une paresse intellectuelle rare de la part des élus du département adeptes du non agir et du non faire (Tao charentais) dont la préoccupation principale est de
masquer qu’ils n’ont aucune vision stratégique sur rien et qu’ils n’ont surtout aucune envie de faire bouger ou reformer quoi que ce soit. Est-ce que j’exagère ? A vous de le
dire.
Si l’on admet la nécessité de faire traverser le flot de poids lourds du sud vers l’est en Charente le plus tôt possible sur une route
à deux fois deux voies aux normes réellement autoroutières. Si l’on admet que la mise à deux fois deux voies complète de Chevanceaux à Limoges au rythme actuel des mobilisations budgétaires ne
pourra être achevée avant 20 à 25 ans. Si l’on reconnaît dans le même temps que le détournement sur Limoges qui oblige les poids lourds à emprunter l’autoroute A20 au nord de Limoges qui se
révèle impraticable pour les poids lourds certains jours d’hiver parce que la pente est trop forte à un endroit précis et bien connu (D Herbreteau précisera ce lieu dans un commentaire) n’est pas
la solution la plus logique et la plus souhaitable. Si dans le même temps on s’accorde à penser qu’il est aberrant de poursuivre un cofinancement départemental et régional pour permettre aux pays
du sud et de l’est de l’Europe de développer leur PNB. Si l’on veut bien admettre que la route nécessite aussi des aires de stationnement adaptées à la spécificité du trafic poids lourds. Si pour
ceux qui aiment ce département il semble enthousiasmant d’être au cœur des échanges européens si tant est que l’on puisse bénéficier de cette chance en disposant d’une route adaptée qui
fluidifierait les échanges sur notre sol. Et bien si l’on adhère à tous ces préalables, la seule solution de long terme à la hauteur des enjeux c’est de créer une autoroute concédée pour relier
Roumazières à la Croisière (Madame Perol Dumont présidente du conseil général de la haute Vienne et député de ce même département a fait connaître son adhésion à ce projet à Pierre Baudriller le
président de l’association Axe Nantes Méditerranée) sans financements publics. Corrélativement la transformation sur place en autoroute concédée de la deux fois deux voies entre Bordeaux et
Roumazières même achevée permettrait de transférer la charge d’entretien au fret transporté plutôt qu’au contribuable national et d’élever le niveau futur d’équipement de cette route. Cette
solution à la hauteur des vrais enjeux pourrait être opérationnelle en moins de dix ans.
Parallèlement la mise à deux fois deux voies sur l’intégralité du tracé de Limoges à Saintes se ferait d’autant plus vite et d’autant
plus facilement que les moyens budgétaires de l’Etat pourraient y être totalement consacrés.
Notre parti pris c’est de penser que la solution extérieure à ce jour pourrait bien être Alain Juppé de par le ministère qu’il dirige
aujourd’hui et la très bonne connaissance qu’il a déjà de la situation pour sa ville et son département. C’est auprès de lui qu’il faut obtenir un rendez vous et de lui
seul.