26 Février 2012
J’ai participé samedi matin à l’assemblée générale de l’association des maires de la Charente au Logis de Lunesse. Notre président, Jean Michel Bolvin, était particulièrement en forme, maniant humour et bons mots toute la matinée. Malgré le contexte préélectoral, les intervenants à la tribune et dans la salle se sont bien gardés de donner une tonalité trop franchement partisane aux débats. Et c’est tant mieux. Les textes bien ciselés des discours des uns et des autres n’en ont été que plus intéressants à entendre.
Le président du Conseil Général, Michel Boutant, s’est livré à un long plaidoyer pour demander aux politiques publiques d’avoir une attention toute particulière envers les zones rurales et les petites communes. Une discrimination positive qui tiendrait compte des nombreux handicaps qu’elles subissent. Selon lui, l’égalité des citoyens au regard de l’accès aux services publics n’est plus assurée à ce jour comme elle devrait l’être et les difficultés grandissent pour ceux qui font le choix de vivre éloigné des zones urbaines. Fustigeant les logiques comptables de l’Etat qui ont pour corollaire le renoncement à l'égalité républicaine géographique, il a soumis à l’assemblée son projet de compenser la baisse des services apportés par l’Etat aux petites communes par la création d’un service d’assistance à ces mêmes communes par le Conseil Général.
Les conclusions que Michel Boutant tire de l’évolution qu’il dénonce sont à mon sens à l’opposé de ce qu’il faut faire. Je m’explique. Les petites communes, chacun le sait, n’ont pas la capacité de rendre tous les services que leurs ressortissants sont en droit d’attendre d’elles. L’assistance « gratuite » et attentionnée de l’Etat diminuant, elles sont en effet dans l’incapacité de se doter de façon autonome de l’ingénierie manquante. En revanche depuis 1992, c'est-à-dire depuis 20 ans, la France a fait le choix de sortir des limites imposées par l’émiettement communal français en permettant aux communes de coopérer plus complètement entre elles que par le passé. Ceci afin de partager à plusieurs l’exercice des compétences qu’elles ne peuvent assumer seules.
L’achèvement de l’intercommunalité qui vient d’être décidé par le schéma départemental élaboré par le préfet et amendé par la CDCI (Commission Départementale de Coopération Intercommunale) marque une étape importante vers la résolution du problème. Si le périmètre de la coopération pour réunir les moyens nécessaires de l’autonomie est encore insuffisant pour certaines communautés dans le cadre de ce schéma, il appartient aux seuls élus de le faire encore évoluer s’ils le souhaitent.
C’est en tout cas vers là qu’il faut aller et il est nécessaire d'encourager sans cesse les élus à rechercher le maximum d’autonomie et d’indépendance communale par la coopération entre les communes. Il n’est plus d’actualité de réinventer une nouvelle forme de dépendance technique des communes envers le département pour les moyens qu’elles ont nécessité de maîtriser elles-mêmes. En intercommunalité, il n’existe plus de petite commune incapable de rendre les services qu’elle doit à ses ressortissants. La commune de Reignac par exemple exerce à nouveau dans le cadre collectif des 4B plusieurs compétences auxquelles elle avait du renoncer, scolaire, enfance jeunesse, économie, animation culturelle, etc…Elle dispose aussi grâce à la communauté d’une assistance technique du type de celle que veut instituer le président du Conseil Général. Alors il reste sans doute encore à caler le processus de décision pour l’achat des ouvre-boîtes au meilleur rapport qualité prix et quelques petites autres choses afin que le pragmatisme soit toujours aux commandes, mais la direction est la bonne.
A mon sens, ce n’est évidemment pas la dépense publique qui est insuffisante, bien au contraire, mais sa rationalisation par une organisation pleinement efficace. Et dans ce cadre, une initiative à contre courant de ce qu’il faut faire, aussi généreuse qu’elle paraisse dans un premier temps, loin de résoudre la difficulté, ne fait que l’aggraver encore et épuise finalement un peu plus le contribuable qu’elle disait vouloir servir.
La présentation par le directeur des territoires (la DDT réunit maintenant la DDA et la DDE) de la nouvelle organisation des services de l’Etat consécutive à la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) contrastait nettement avec le conservatisme assumé du président du Conseil Général. La mutualisation des moyens de l’Etat par la fusion de ces deux directions a déjà montré son efficacité, comme nous l’a illustré le directeur samedi matin. Les difficultés à résoudre lorsqu'une réforme de grande ampleur comme celle ci est engagée sont évidemment plus visibles au début que les bénéfices attendus qui ne deviennent perceptibles que plus tard. Soutenir la résistance au changement est rarement le gage d'une vision éclairée de l'avenir.
En fait ce sont les évolutions démographiques en Poitou Charentes présentées par le directeur régional de l’Insee qui à mon sens devraient mobiliser les élus sur les choix stratégiques que l’on attend d’eux. Comment ne pas percevoir que la contre performance charentaise dans la région est tout entière liée au défaut de vision stratégique de nos « grands » élus pour le développement économique, touristique, organisationnel du département. Nous payons cher de ne pas avoir su imposer dans les priorités nationales, par exemple, le tracé du corridor européen de fret qui traverse la Charente du sud vers l’est. Le combat reste à mener sur ce thème comme sur d'autres.
La présentation somme toute assez déprimante de la situation des finances locales et des réformes en cours de la part de Michel Boutant nécessitait en contrepoint l’éclairage minutieux et étayé que nous a offert madame la préfète. Il était important de dire à l’assemblée la réalité des chiffres en matière de recettes des collectivités locales et de dotations le l’Etat. Malgré la réforme de la TP (taxe professionnelle), celles-ci n’ont évidemment pas baissé et ont même augmenté un peu en 2011.
Face aux timorés qui sont toujours en résistance pour conserver une sorte d’ordre ancien idéalisé, je fais partie de ceux qui acceptent les changements que chacun d’entre nous initient librement chaque jour sur cette planète. Les innovations techniques et organisationnelles combinées avec la quête insatiable des individus pour la satisfaction de leurs désirs nécessitent une adaptation permanente de la sphère publique. « Il n’y a rien de permanent, si ce n’est le changement » disait Lao Tseu. Alors autant l’accompagner et le maîtriser efficacement avec un peu d’enthousiasme.
Sud Ouest nous informe que Marie-Line Reynaud a voté contre la participation de la France au MES (Mécanisme Européen de Stabilité) cette semaine à l’Assemblée. Martine Pinville et Jérôme Lambert se sont abstenus, conformément à la consigne du PS et Jean Claude Viollet n’a pas participé au vote. Je vous mets un lien vers la réaction de Daniel Cohn Bendit et de quelques autres dans le Monde. Ils qualifient de bourde historique le refus socialiste d’approuver le MES. Sur ce sujet et sur bien d’autres, vous vous en doutiez, je serai clairement en opposition avec la candidate socialiste que je me suis empressé d’aller saluer samedi matin.
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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