19 Avril 2012
LE MONDE | 19.04.2012 à 14h17 • Mis à jour le 19.04.2012 à 14h17
Par Jean d'Ormesson, De l'Académie française
J'ai décidé de soutenir Nicolas Sarkozy quand j'ai entendu l'opposition le traiter de "menteur", de "voyou", d'"escroc", assurer que son quinquennat avait été un" désastre" et son bilan "nul", "dramatiquement négatif", bref, "un fiasco". J'ai regardé les chiffres. Ils sont très clairs. Et ils ne sont contestés par personne ? Même dans l'opposition, qui continue pourtant à chanter sa rengaine qui étonne les étrangers. Le chômage tourne en France autour de 10 %, en Espagne autour de 20 %. Le pouvoir d'achat a progressé en cinq ans.
Légèrement. Mais il a progressé. Dans la succession des crises violentes qui ont secoué les Etats-Unis, l'Europe, la France, Nicolas Sarkozy a fait mieux que tous nos voisins. Sauf l'Allemagne.
Mais s'il avait appliqué chez nous les méthodes et les mesures qui ont fait le succès de l'Allemagne, les Français seraient descendus en masse dans la rue. Pendant cinq ans, avec courage, dans les pires conditions, Sarkozy a tenu le pays hors de l'eau. Il a accompli des réformes nécessaires à la survie d'un modèle social que les autres nous envient. Et, à plusieurs reprises, il a sauvé l'Europe et l'euro.
Je ne crois pas aux discours, aux promesses, aux déclarations d'intentions, à ces débats perpétuels dont on ne retient jamais grand-chose et qui finissent par lasser. Je crois aux exemples vivants. François Hollande est intelligent et charmant. Et il est socialiste. Zapatero, en Espagne, ou Papandréou, en Grèce, sont aussi intelligents et charmants et socialistes. Chacun peut voir où ils ont mené leur pays. Zapatero a même constitué un modèle pour les socialistes. Ségolène Royal se présentait volontiers comme une "Zapatera". Poussons un peu le bouchon ? Mais à peine. Voter pour Hollande, c'est voter pour la situation laissée à l'Espagne par les socialistes. Voter pour Hollande, c'est voter pour faire des Français ce que sont devenus les Grecs.
Il faut aller vite. Voilà pour les programmes. Passons aux hommes. Il suffit de dire de Hollande ce que disaient de lui, avant d'être contraints de le soutenir, ses amis socialistes, Martine Aubry, Laurent Fabius, Jack Lang et les autres. Sans même parler d'Eva Joly ni de Jean-Luc Mélenchon. Hollande est sympathique.
A-t-il l'étoffe du chef qu'on attend dans les tempêtes ? J'aurais voté pour lui les yeux fermés en 1970, en 1950, en 1925. Je n'aurais pas voté pour lui en 1939. Ni en 1929 : il n'est pas l'homme des grandes crises. Je ne voterai pas pour lui le 22 avril, ni le 6 mai. Parce qu'il a fait trop peu dans le passé et qu'il promet trop pour l'avenir. Il n'a laissé quelques traces assez minces qu'en Corrèze et au Parti socialiste : la Corrèze est un de nos départements les plus endettés et les socialistes ne semblent pas avoir gardé un souvenir inoubliable de son passage en tant que premier secrétaire.
François Hollande se présente sur la scène présidentielle flanqué de deux monstres politiques : Eva Joly et surtout Jean-Luc Mélenchon. Opposés avec violence sur des points aussi décisifs que le nucléaire ou la centralisation, Mélenchon et Joly se détestent entre eux. Et, chacun pour son compte, tous les deux détestent François Hollande.
Il faudrait un caractère de fer pour s'imposer face à eux. Autour de lui ou contre lui, leurs ombres plombent tout projet de Hollande. Les illusions de 1981 ont duré deux ans avant le tournant brutal de 1983. Si Hollande était élu, on ne lui donnerait pas six mois avant un réveil plus dur encore. Il ne serait plus temps alors de pleurer sur le mal accompli : les dégâts seraient cruels.
Si vous êtes socialiste, vous n'avez pas le choix : vous voterez Hollande. Si vous êtes communiste ou trotskiste, vous voterez Mélenchon. Mais si vous n'êtes ni communiste, ni trotskiste, ni socialiste, alors, votez Sarkozy. Parce que la situation du pays ravagé par la crise est moins tragique que ne le répète l'opposition. Et parce qu'il est toujours possible de changer pour le pire.
Jean d'Ormesson, De l'Académie française
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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