1 Avril 2007
Pierre Dac disait « à la triple question du philosophe : qui suis-je ?d’où viens-je ?où vais-je ?je réponds: je suis moi, je viens de chez moi et j’y retourne ». Pourquoi est-ce cette pensée du grand humoriste de l’absurde qui m’est venue à l’esprit à la fin du débat qui a suivi la projection du premier film de Bernard Werber, « nos amis les terriens » ? C’est sans doute parce que cette jolie pirouette permet d’échapper aux questions ontologiques toujours sans réponses et au vertige métaphysique qu’elles provoquent à coup sûr. .
Il y avait donc double salle comble hier soir au cinéma le Club pour assister au deuxième grand rendez vous donné par Cinémania pour ce 11ème festival consacré à quatre premiers films. Celui d’hier soir « Nos amis les terriens » est un film construit comme un documentaire animalier consacré à l’espèce humaine dont les auteurs seraient des extraterrestres. Le film est agréable à regarder, bien construit. On sent la filiation avec le producteur du film, Claude Lelouch. Quelqu’un disait lors du débat qui a suivi que Lelouch filmait l’homme vu par d’autres hommes et qu’avec Werber on passait à l’homme vu par des extraterrestres. Cette distanciation nous fait prendre conscience (si ce n’est pas déjà le cas) que nous ne sommes que l’une des espèces animales de la planète terre, apparue assez récemment et dont le comportement peut sembler encore assez primitif.
« Plus c’est vrai et plus c’est magique » dit Bernard Werber. C’est ce qui se ressentait une nouvelle fois après la projection du film quand le dialogue s’est instauré entre l’auteur et le public réuni dans la grande salle. Il nous a exprimé sa peur du 18 avril, jour de la sortie nationale du film en salles. Il dit que ce film est d’un genre nouveau, inclassable et que le public n’est sans doute pas prêt. Jusqu’à ce jour les critiques qu’il reçoit sont plutôt négatives et il m’a semblé que l’accueil très chaleureux qui lui a été réservé à Barbezieux l’a plutôt réconforté. Parmi les échanges toujours très nourris comme à l’habitude au cinéma le club il y a eu quelques instants particulièrement drôles quand Werber a comparé le fonctionnement des individus de l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur, auquel il appartenait, à sa description de la communauté des rats, avec ses rapports de force, le marquage des territoires et autres joyeusetés stériles. Un de ses collègues se serait exclamé à la lecture de son récit : « mais c’est exactement la rédaction que tu décris là ! » Ce qui me semble très intéressant dans sa démarche c’est de réincarner l’homme pour tenter de l’observer en tant que bête comme on le fait dans un documentaire animalier, si possible sans anthropomorphisme. La voix off du commentaire de Pierre Arditi tient ce rôle à la perfection. Ça me fait également penser au travail de deux autres auteurs de best-sellers, Allan et Barbara Pease, deux anthropologues américains qui analysent nos comportements en relation avec l’évolution de l’homme depuis ces dernières trois millions d’années. Leurs livres sont bien plus sérieux que leurs titres ne le sous entendent. Le premier s’intitulait : « pourquoi les hommes n’écoutent jamais rien et pourquoi les femmes ne savent pas lire une carte routière ». Difficile pourtant dès lors qu’un tel regard réflexif est possible de chercher des excuses pour nos comportements en se réfugiant derrière le déterminisme de nos gènes et de notre histoire. Comme me l’indiquait mon voisin de fauteuil finalement ce film est bien moins anodin qu’il n’y parait au premier abord.
Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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