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Le temps des queues de cerises.


Cette interview publiée ce soir sur Le Monde.fr mérite d'être lue très attentivement. Il me semble en effet que la responsabilité de la commission apparait nettement dans les propos du porte parole qui à aucun moment n'évoque l'inadmissible temps de réaction de sa boutique. C'est au moment où se produisent les faits en matière de concurrence sur les marchés de fruits et légumes que l'intervention doit avoir lieu pas une génération plus tard. Et le boulot de la commission c'est de s'organiser pour avoir cette éfficacité. Sans cette dimension temps tout ce qu'il dit est d'une monstruosité insupportable. Parce que dans cette affaire ce n'est pas le "coupable" qui est sanctionné. Qu'en pensez vous? 




Amadeu Altafaj Tardio, porte-parole de la Commission européenne

 

Pour la Commission européenne, "un système d'aides parallèle n'est pas acceptable au sein de la communauté"

 

LEMONDE.FR | 04.08.09 | 18h56  •  Mis à jour le 04.08.09 |

 

Que reproche précisément la Commission européenne au gouvernement français ?

En 2005, la Commission européenne a ouvert une enquête concernant tout un schéma d'aides qui couvre la période 1992-2002, qui avaient été mises en place en France de façon parallèle aux aides communautaires pour le secteur des fruits et légumes. Ceci n'est pas correct dans un marché communautaire : il y a une distorsion claire de la concurrence, et donc il y a un préjudice aux agriculteurs d'autres Etats membres.

 

C'est cette situation d'inégalité qui fait que nous devons demander le recouvrement de ces aides. Pour nous, il est clair que l'existence de schémas parallèles n'est pas acceptable. Néanmoins, la Commission a adopté une approche très ouverte, nous avons entretenu un dialogue pendant des années avec les autorités françaises afin de revenir à une situation de conformité avec les règles européennes. [Le ministre de l'agriculture] Bruno Le Maire a montré une volonté claire de revenir à la normale.

En quoi consistent exactement les aides octroyées aux producteurs français de fruits et légumes ?

Il s'agit d'aides décidées par les seules autorités françaises entre 1992 et 2002, qui se sont ajoutées aux aides européennes. Il y a une organisation commune de marché des fruits et légumes au niveau européen. Or, ces aides visaient à soutenir les prix, alors qu'il y avait un excédent de production en France. Il s'agissait notamment d'aides au stockage, à la destruction, à l'exportation vers des pays tiers, de sorte que les producteurs français bénéficiaient d'un cumul d'aides européennes et françaises qui représentaient un avantage concurrentiel clair vis-à-vis des autres Etats membres.

Selon Jean Glavany, ancien ministre de l'agriculture entre 1998 et 2002, ces aides étaient justifiées. "L'Etat n'avait pas le choix et ne pouvait attendre que la production soit à l'agonie", selon lui.

M. Glavany n'est plus ministre à l'heure actuelle, c'est pourquoi je ne souhaite pas me référer trop directement à ses propos, mais ce que je peux dire, c'est que lorsqu'il y a une situation exceptionnelle, une crise particulièrement aiguë, la Commission européenne discute avec les Etats membres de ces questions, parce qu'il y a une politique agricole commune, parce que c'est une politique européenne. Nous prenons alors des mesures ad hoc : il y a toujours une flexibilité.

Ce qui n'est pas possible, c'est que des schémas d'aides complètement indépendants, qui ne sont même pas communiqués aux autres partenaires européens, créent un système parallèle. Il est clair que cela va à l'encontre de l'intérêt des autres pays européens, et les producteurs français sont les premiers concernés par l'utilité de ces règles. C'est la seule façon de maintenir une agriculture compétitive en Europe : le partage de règles claires et précises. Il y a des dérogations, mais on les discute entre partenaires européens.

A quel montant s'élèvent les aides dont nous parlons ?

Nous ne sommes pas en mesure d'estimer précisément le montant de ces aides, puisque nous attendons le rapport des autorités françaises pour établir les sommes qui doivent être recouvrées. Le montant total comprendra les aides versées dans le cadre des mesures qui ont été mises en place, mais aussi les intérêts qui y sont associés. Le gouvernement français doit nous fournir le 29 septembre un rapport complet précisant les bénéficiaires de ces mesures, les montants alloués, et les raisons du versement de ces aides. C'est un calcul extrêmement difficile, puisque ce sont des aides qui s'étalent sur dix ans, d'où notre compréhension face à la demande de délai supplémentaire pour la remise de ce rapport.

Que répondez-vous aux agriculteurs qui arguent que d'autres types de distorsion de la concurrence existent chez nos voisins européens, notamment une main-d'œuvre souvent moins chère qu'en France ?

La question de la main-d'œuvre n'est pas couverte par la politique agricole commune. Il n'existe pas de règles européennes sur le sujet. Nous, nous sommes les arbitres des règles que les Européens se sont données, pour tout ce qui concerne les aides à l'agriculture.

Pourquoi revenir en 2009 sur des aides attribuées entre 1992 et 2002, compte tenu du contexte économique global et des tensions que celui-ci implique ?

A en croire les médias, on a le sentiment que cette information arrive comme une surprise, comme si on gardait cela dans nos tiroirs dans le seul but de la rendre publique en plein mois d'août, quand tout le monde est en vacances. Mais c'est faux, l'affaire était connue. L'enquête a été ouverte en 2005, et cette information a été relayée par les autorités françaises. Il y a eu des articles à l'époque, en 2005, mais le dossier a été sans cesse repoussé. Dès le 28 janvier 2009, la Commission a publié un communiqué de presse donnant le résultat de cet examen.

Suite à cela, l'Etat membre concerné bénéficie de deux mois pour prendre ses dispositions et se conformer aux règles européennes. Mais nous avons accordé un délai supplémentaire à la demande des autorités françaises, jusqu'au 29 juillet. Nous avons reçu une nouvelle demande de report émanant des autorités françaises, qui a été acceptée par la Commission européenne, et ce jusqu'au 29 septembre. En revanche, c'est M. Lemaire qui a décidé qu'il était temps de se remettre en conformité aujourd'hui.

Pourrait-on envisager que le gouvernement français paie une amende à la Commission européenne au lieu d'exiger le remboursement des aides par les agriculteurs ?

Absolument pas, et cela n'aurait aucun sens : il ne s'agit pas de l'argent de la Commission européenne puisque ces aides sont françaises, il n'y a donc aucune raison pour que la Commission perçoive une somme, quelle qu'elle soit, des autorités françaises. C'est à l'Etat français de récupérer cette somme afin de se conformer aux règles. En revanche, si la France avait refusé de se plier à ces règles malgré la publication du rapport, elle aurait eu, en plus du remboursement des aides versées aux agriculteurs, à payer une amende : il n'y a aucune contestation possible sur les faits.

Les agriculteurs ayant une forte capacité de mobilisation, que peut leur répondre M. Lemaire, si ces derniers maintiennent leurs positions et font pression sur le gouvernement ?

M. Lemaire a dit que ce n'est pas en prenant la Commission européenne comme bouc émissaire qu'on trouvera une solution au problème. Il existe un problème objectif. Les agriculteurs français ont intérêt à ce qu'existent des règles de concurrence loyales, sans quoi la survie même de l'agriculture européenne est menacée. Bien sûr les aides publiques sont nécessaires, mais pas à la carte. Sinon, tous les agriculteurs de la communauté vont payer le prix de cette dérégulation.

Propos recueillis par Célia Héron

 

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À propos

Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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