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Le b.a ba de l'économie des fruits et légumes frais pour les Nuls.

J’ai participé mercredi et jeudi au congrès de la Fédération Nationale des Producteurs de Fruits qui se tenait cette année dans la bonne ville thermale et tauromachique de Dax.

 

 J’ai eu grand plaisir à revenir dans la sous préfecture des Landes que j’ai découvert il n’y a pas si longtemps, un 15 août, à l’invitation du célèbre kiwiculteur François Lafitte. Un foulard rouge autour du cou, j’avais assisté à ma première « mort l’après midi » à la plaza de toros, après un déjeuner à la terrasse du Splendid, à une table voisine du plus fidèle aficionado des lieux, Pierre Albaladejo. Et c’est de nuit forcément que nous avions arpenté ensuite, avec le groupe d’amis des « fruits et légumes d’Aquitaine », les rues animées de Dax.

 

Je me souviens que ces quelques heures m’avaient donné envie d’en savoir plus sur la tauromachie et que j’avais dévoré les jours suivants le célèbre roman d’Hemingway et « Ou tu porteras mon deuil », la biographie du toujours vivant El Cordobés écrite par Dominique Lapierre et Larry Collins. Et puis je lis depuis régulièrement avec gourmandise les articles de Zocato, le dimanche dans Sud Ouest.

 

Pour ceux que ça intéresse, il y a sur ce blog quelques photos commentées d’une rencontre du même type qui a eu lieu deux ans plus tard. L’article est daté du 17 août 2007 et  vous le trouverez sous le nom : « 15 août au pays Basque ».

 

Pas de corrida au programme cette semaine, seulement une petite réception à la mairie et un diner de gala au Casino que François a eu la très bonne idée de faire animer par un chœur d’hommes et des chants basques. C’est le bon côté de l’engagement professionnel que de pouvoir bénéficier de tels moments.

 

Voyons voir en revanche ce qu’il en est de l’apport de ce congrès au regard d’une éventuelle amélioration des perspectives pour l’économie de  la production fruitière dans notre beau pays. A-t-on enfin réussi à réinventer l’eau chaude à Dax ?

 

J’étais tout particulièrement impatient d’entendre les participants à la table ronde de jeudi matin évoquer les nouvelles relations commerciales supposées découler de la mise en application de la Loi de Modernisation Agricole.

 

L’échange a commencé par une présentation des principales dispositions de la loi qui concernent  la commercialisation des fruits et légumes frais. La jeune représentante de la DGCCRF (consommation, fraudes et concurrence) a pu annoncer que dès le lendemain, les transactions pour ces produits devaient s’effectuer en prix nets, sans rabais, ristournes ou remises possibles. La loi interdit aussi dorénavant qu’une fois la marchandise agréée l’acheteur puisse la retourner à son vendeur. Le gros morceau est venu ensuite avec la description de la contractualisation obligatoire entre l’acheteur et le producteur de fruits et légumes frais. Ces contrats dont le contenu a été précisé par un décret publié le 31 décembre 2011 doivent, dès le 1er mars, être proposés par les acheteurs aux producteurs, couvrir une période de trois ans, mentionner des indications de volumes, les modalités de formation des prix, et quelques autres clauses habituelles. Le défaut de proposition par l’acheteur d’un contrat conforme en tout point au décret sera sanctionné d’une « prune » de 75.000 euros par producteur concerné. En revanche le producteur est libre de refuser le contrat et les relations peuvent alors se poursuivre comme auparavant.

En cas de crise il a été rappelé à l’assemblée qu’en se fondant sur l’observatoire des prix et des marges, des accords de modération de marges seraient à nouveau signés entre l’Etat et les grands distributeurs.

 

Le directeur du service statistique de France Agrimer a ensuite présenté quelques graphiques montrant l’évolution comparée des prix à la consommation et à la production pour quelques fruits ou légumes. Nous avons ainsi pu constater que les deux tracés ont des allures assez similaires et que les prix de vente à la consommation sont plus élevés que le prix obtenus par le producteur. Difficile, nous a dit l’éminent statisticien d’en tirer plus de conclusions pour l’instant.

 

Ce fut ensuite au tour de Jean Baptiste Pinel de témoigner. Il est directeur commercial de Prim’land, la filiale des deux coopératives Scaap Kiwifruits de France et Maïsadour, qui commercialise près de 40.000 tonnes de kiwis, pommes, asperges, carottes, maïs doux et même piment. J’attendais, vous vous en doutez, son intervention avec impatience. C’est un type souriant, vif, au contact direct, qui respire le dynamisme. Son quotidien c’est le marché, la négociation, la revendication du meilleur prix possible à chaque instant pour les productions des coopérateurs qui sont ses employeurs. L’économie des fruits et légumes, il la vit au quotidien, lui.

 

Il s’est exprimé prudemment. D’abord pour dire que la suppression des rabais, ristournes et remises était une bonne décision. Parce qu’au fil du temps dans la relation commerciale quotidienne, le vendeur oublie ces concessions récurrentes et n’en tient plus forcément compte dans la formation du prix. Cette opacité profite à celui des acheteurs qui réussit à imposer le plus de ces rabais, ristournes et remises. Parce que les contreparties, que ces remises sont sensées couvrir, n’existent évidemment pas. Alors il dit aussi que le génie créatif des acheteurs va bien sûr les conduire à proposer d’autres types de rançonnements, mais que ce sera plus lisible et donc que les contreparties devront être plus réelles.

 

En revanche, il a prudemment évoqué ses doutes quant à la pertinence de la contractualisation dont il ne voit pas bien comment elle peut permettre d’optimiser finement les prix au quotidien en fonction de l’état de l’offre et de la demande. Il a timidement prononcé le terme « d’économie administrée » et on ressentait bien qu’il n’associe pas ces termes à un quelconque Eldorado sur Adour. Et puis il s’est laissé un peu plus aller pour dire qu’il ne voyait pas très bien non plus à quoi pouvait servir cet observatoire des prix et des marges. Que son boulot à lui c’était d’arracher au quotidien la meilleure valeur possible pour ses produits et que si ses acheteurs gagnaient leur vie ensuite, ça le rassurait plutôt. Et que comme cette « transparence » ne nous apprend rien sur le résultat net des uns et des autres, ça ne peut servir qu’à savoir globalement comment se répartit l’argent. Pour quelle utilité ? J’ai cru percevoir qu’il pensait très fort à cet instant aux malheureux drosophiles dont je vous parlais il y a quelques jours.

 

En quelques mots tout était presque dit ou perceptible. Evidemment il aurait fallu créer un solide climat de confiance pour que Jean Baptiste explique plus longuement et dans le détail la réalité complexe du marché. L’assemblée aurait alors ressenti l’évidence de l’inutilité, voire la nocivité d'une partie de la réponse législative au problème de la nécessité d’une meilleure valorisation des productions fruitières et légumières. Dommage.

 

L’intervenant suivant était Jean Bernard Bayard, le secrétaire général adjoint de la FNSEA. Autant j’avais envie d’entendre Jean Baptiste, autant je me préparais à souffrir avec cet apparatchik que j’avais déjà enduré une première fois à Montauban en juin dernier. Son intervention de Dax a été heureusement un peu plus courte, mais malheureusement du même tonneau de concepts creux et fumeux que j’avais déjà entendu. Ce qu’il dit n’a ni queue ni tête, il ne finit aucune phrase, glisse en permanence des sous entendus auxquels on n’entrave que dalle, déverse son flot de paroles en faisant varier les intonations pour essayer de donner du relief à ses platitudes. Le tout en arborant un imperturbable et étonnant sourire. Si comme le dit si bien Nicolas Boileau « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément » il est flagrant qu’il y a comme un défaut du côté de l’entendement chez cet homme. Le problème c’est qu’il est tout en haut de la grande maison et paradoxalement très influent auprès du gouvernement. Il est l’un de ceux à qui l’on doit la coproduction de cette LMA, qui au moins dans sa disposition concernant la contractualisation obligatoire plombe un peu plus la compétitivité de la France, ce qui m’est parfaitement intolérable.

 

Il faut l’avoir entendu dire sans rire que cette loi n’est pas exactement comme il l’aurait souhaitée mais que, de la même façon sans doute que quand le vin est tiré il faut le boire, quand la loi est votée il faut se l’enquiller, qu’il n’est plus temps de la remettre en cause. Cette cogestion affichée permet au moins à l'arboriculteur d'avoir la confirmation que de temps en temps le syndicalisme fonctionne un peu trop à l'envers, c'est à dire de haut en bas. 

 

Je vous propose plutôt de passer cette fameuse contractualisation obligatoire au banc d’essai des réalités techniques de la production et de la mise en marché des fruits et légumes. Nous allons bien voir ainsi ce qu’il convient de faire et de proposer si l’on veut réellement servir les intérêts des producteurs et des consommateurs de fruits et légumes frais en France. Mais aussi si l’on souhaite vraiment contribuer à l’amélioration de la compétitivité de la France. C'est une cause qui m’apparaît si impérieuse et si urgente aujourd’hui qu’elle me libère de certaines prudences ou conventions d’usage. 

 

Les fruits et légumes destinés à la vente en frais ont tous des caractéristiques différentes. Du tout début de la production jusqu’à la consommation finale, tous les paramètres différent.

 

La pomme nécessite par exemple un verger planté pour plusieurs années. Malgré des protections contre les aléas climatiques et quel que soit le niveau de technicité du producteur, la quantité et la qualité des fruits récoltés varient sous l’influence du climat. La conservation des fruits une fois cueillis dure jusqu’à douze mois avec le plus souvent de bonnes où de mauvaises surprises. A cela s’ajoute une innovation permanente qui se traduit par une compétition incessante entre de très nombreuses variétés. Et c’est la même chose partout sur la planète. Au départ des stations fruitières les pommes sont vendues dans une fourchette de prix qui va de zéro centime d’euro à deux euros le kilo. La cotation se fait au quotidien, référence par référence, en fonction de l’offre et de la demande, selon le volume récolté et au regard de la demande supposée. L’abondance ou la rareté des autres fruits et légumes influe aussi plus ou moins sur les cotations journalières.

 

La cerise, comparativement, exacerbe toutes les variables décrites pour la pomme. L’influence des aléas climatiques est bien plus grande pour ce fruit. L’offre est encore plus imprévisible. Si l’on ajoute à cela que le temps de conservation est très court, on comprend facilement la volatilité qui va s’exprimer dans les prix.

 

Il est inutile de tous les passer en revue pour comprendre l’infinie diversité de paramètres qui rendent par nature aléatoire l’état quotidien de l’offre et de la demande pour chacun d’eux.

La volatilité est moindre pour les fruits qui se conservent longtemps et dont on peut connaître assez précisément les potentiels de production. Elle est au maximum quand l’aptitude à la  conservation est très courte et quand on connaît moins le potentiel de production.

 

Au-delà des caractéristiques des fruits et des légumes, il y a aussi une très large palette de types de producteurs et de circuits de distribution. Depuis ce qu’il est convenu d’appeler le petit producteur qui vend directement au consommateur à la périphérie des villes, sur les marchés ou à la ferme, en passant par des producteurs expéditeurs de toutes tailles qui vendent par eux-mêmes aux distributeurs, à destination de la France ou d’ailleurs, jusqu’aux producteurs, petits ou gros, regroupés en coopératives, ou tout autre type d’association, pour vendre sur tous les marchés nationaux et mondiaux, la diversité est conséquente.  

 

Mais tous ont un point commun, ils vivent l’incertitude permanente des volumes et des qualités qu’ils récolteront et des prix qu’ils obtiendront. Tous savent aussi qu’aucune situation n’est jamais acquise et que de nouvelles variétés ou de nouveaux produits peuvent cannibaliser les leurs. Tous sont aussi soumis à cette même obligation de couvrir leurs charges, sous peine de disparaître à plus ou moins long terme. Et tous sont très conscients que le prix de revient est une donnée spécifique à chacun, qui est très utile pour savoir à partir de quand on gagne de l’argent et à partir de quand on en perd, mais dont le marché se fout éperdument.

 

Ça peut paraître effroyable mais c’est bien cela la réalité de l’économie des fruits et légumes frais. Si l’on met de côté la grave question des facteurs de compétitivité nationaux qui nous sont défavorables aujourd’hui, peut-on alors identifier les clés de la réussite pour un producteur dans un tel contexte d’incertitude ? En fait, c’est devenu au fil du temps de plus en plus simple, il faut être bon dans tous les domaines du champ d'action d'une entreprise. Et dans un contexte de quasi surproduction permanente, ceux qui sont un peu moins performants finissent par disparaître. Et ce n’est pas forcément la taille qui fait, à elle seule, la différence.

 

Il faut produire le fruit ou le légume de qualité souhaité par le marché, au coût de revient le plus bas, le vendre soi même au consommateur, au grossiste, au distributeur, ou en confier la vente à un expéditeur ou à une coopérative qui vous appartienne en propre, ou collectivement avec d’autres producteurs qui partagent les mêmes objectifs. Jusqu’à ce stade, tous les étages doivent se comporter en patron propriétaires, prêts à prendre des risques pour tester en permanence la limite maximum du prix qui peut-être obtenu. Il faut une identité reconnue, une marque, une fiabilité technique et logistique sans faille et un partage de l’information optimisé avec les autres metteurs en marché du même type. Malgré cela, certaines années il se perd de l’argent et ce sont les fonds propres non distribués qui aident certaines exploitations à résister plus longtemps que d’autres pour d’attendre le retour de configurations plus équilibrées. Je pourrais complexifier en mentionnant l’inégalité des paramètres de résistance entre producteurs en fonction de la diversification de leurs productions. Il y aurait tant d’autres paramètres qu’il serait nécessaire d’évoquer pour comprendre la cohérence de ce qui semble toujours absurde, injuste ou anormal, à celui qui ne se donne pas le temps d’observer humblement.

 

Compte tenu de ce contexte, quelles conséquences attendre de la mise en œuvre de la contractualisation obligatoire au 1er mars?

 

L’objectif de cette disposition, il faut le rappeler, est de mieux valoriser les fruits et légumes frais, donner de la visibilité économique au producteur, promouvoir la concentration de l’offre, diminuer les mouvements erratiques des cours, contraindre l’acheteur à se préoccuper de permettre son fournisseur de vivre de sa production, le tout pour redonner des couleurs et des résultats à la production et aux producteurs par de nouveaux comportements des opérateurs.

   

Voyons tout d’abord à qui il faut proposer un contrat et pour qui ce n’est toujours pas nécessaire. A partir de quel stade de commercialisation la marchandise se voit dispensée de devoir être contractualisée.

 

Il semble que dès lors qu’un premier transfert de propriété a été opéré, il n’y ait plus nécessité de se voir proposer un contrat par l’acheteur suivant. La coopérative par exemple contractualise avec ses coopérateurs et peut ensuite commercer librement. Il est dit cependant que les statuts de la coopérative ne seraient pas en l’état suffisants et qu’il y aurait lieu de mentionner quelque chose en plus dans le règlement intérieur. Vous imaginez ce que ça peut être ? Moi, pas vraiment. La coopérative met en marché les productions de ses membres, déduit des frais et verse la différence aux apporteurs. En général le contrat entre le coopérateur et sa coopérative dure plus de trois ans. Qu’est-ce qu’on peut dire de plus. Que l’on vendra un peu plus cher dorénavant pour pouvoir donner un peu plus que ce que l’on aurait donné avant que la loi ne soit votée ? Absurde, bien sûr. Donc je ne vois pas. Mais je vous dirai dès que je saurai.     

 

Pour ce qui concerne les autres types de filiales de mise en marché des producteurs, dès lors qu’il y a bien transfert de propriété, elles devront toutes proposer un contrat aux producteurs membres. Comme pour les coopératives, je ne vois pas bien ce qui pourra être dit de plus de la relation contractuelle qui lie les producteurs entre eux et à la filiale qu’ils ont créée, mais il y aura lieu d’écrire quelque chose de forcément inutile en plus. Puisque la durée d’engagement est déjà bien entendu prévue pour durer bien au-delà des trois ans, que les volumes qui font l’objet de la relation sont le plus souvent la totalité des récoltes et que le prix résulte au final de ce qui a pu être pris sur le marché.

 

Pour ce que l’on appelle les organisations de producteurs, la loi ne change donc rien, si ce n’est qu’il va falloir faire travailler un juriste ou prendre du temps pour faire un rajout, même pas cosmétique, dont on se serait bien passé. Des emmerdements en plus et aucune valeur ajoutée. Ces grains de sable étaient-ils nécessaires ?

 

Voyons voir maintenant le cas des producteurs qui n’ont pas de filiale commerciale qui leur appartienne et à qui un tiers va devoir proposer lors d’un achat une contractualisation de trois ans, qui mentionne des volumes pour des types de produits et des modalités d’établissement de prix.

 

Je pense au producteur qui a fait le choix de vendre sa récolte bord verger au plus offrant chaque année. L’acheteur devra pour dénouer la vente proposer un contrat qui comprenne les clauses qui viennent d’être rappelées. Le producteur, s’il souhaite continuer à vendre de la sorte, devra créer une filiale commerciale avec laquelle il résoudra le problème que lui crée la loi, ou bien il s’arrangera avec son acheteur et un juriste pour se voir proposer un contrat conforme en tous points, mais qu’il refusera parce que décidemment il sera inacceptable. Pourquoi cela me direz-vous ? Pour une raison tellement évidente que ça me fait de la peine de devoir la rappeler sans cesse. Un acheteur n’a pas le moins du monde la possibilité de s’engager auprès d’un producteur à le rémunérer au dessus de ce que seront les cours du marché. Et comme l’acheteur ne sait absolument pas quel seuil minimum les cours pourront atteindre, il ne pourra s’engager que sur un prix inférieur à ce prix minimum et compléter en disant que les prix seront réajustés en fonction des cours du jour. Pour ce qui concerne les volumes la plus grande prudence sera toujours de mise. Tout ça que pour ça. Oui tout ça pour rien.

 

 

Nous allons donc voir fleurir des filiales commerciales coûteuses et des montagnes de papier tout aussi inutiles que conformes à la loi. La formation des prix à tous les stades de la filière n’en sera pas modifiée d’un iota.

 

Prenons le cas maintenant d’un producteur expéditeur isolé qui a développé son entreprise auprès d’une distribution de proximité, grossistes, détaillants, particuliers. Naïvement il se contentait d’une seule entité sociétaire, voire exerçait en nom propre. Demain chacun de ses clients, hors particuliers, va devoir lui proposer un contrat de trois ans au moment de l’achat de ses premières bottes de radis en mars. Comme cela me l’a été confirmé par un consultant auprès de la distribution, la plupart des patrons de magasins d’enseignes franchisées qui n’ont pas de service juridique adapté à ce travail réglementaire vont laisser tomber illico leur fournisseur local pour repasser vers la centrale d’achat. Comme je doute que le producteur ait envie de se laisser mourir aussi facilement, s’il en a encore les moyens, il va se précipiter chez son cabinet comptable pour créer la filiale commerciale avec des membres de la famille. Il libérera ainsi son acheteur de cette contrainte en l’assumant seul. Voilà une loi qui au lieu de rendre service au producteur lui augmente nettement ses coûts en stimulant l’activité des juristes et des comptables, voire des avocats sans oublier l'administration française qui aurait plutôt besoin, elle aussi, qu'on lui allège les tâches.      

 

Prenons un troisième exemple. Celui du producteur qui vient sur le marché de Chateaurenard au moment de sa récolte et qui dépose à ses pieds quelques caisses de sa cueillette à la recherche de son acheteur du jour. Que va-t-il se passer ? Cet arboriculteur va-t-il se précipiter pour intégrer une coopérative, s’affilier à un expéditeur, créer une société commerciale ? J’en doute. Certains cesseront un peu plus tôt que prévu de produire, d’autres s’arrangeront pour que le contrat type de l’acheteur soit à la fois aux normes et inacceptable afin de le refuser, mais très peu changeront spontanément pour un autre mode d’organisation, qu’ils auraient déjà pu adopter s’ils l’avaient souhaité.

 

En fait, les producteurs qui seront les moins touchés seront encore ceux qui vont vendre sur le marché de Saint Etienne du Grès, dans le Vaucluse, là où la facture est aussi rare que le contrat, où producteurs et vendeurs se parlent cash, comme on dit dans le 9.3.  

 

En résumé, les contrats rendus obligatoires ne peuvent en aucun cas comprendre des prix et  des volumes fixes qui puissent être acceptables pour le vendeur. La notion de formation du prix prédéfinie est techniquement une illusion. On ne peut en aucun cas dire qu'elle résultera d’autre chose que de la négociation de gré à gré le jour de la vente. Il en va de même pour les volumes dont personne ne sait à l’avance ce qu’ils seront à la production ou à la vente.

 

Ce n’est pas de la mauvaise volonté de la part des opérateurs, ni un comportement pervers de spéculateurs, c’est tout simplement la nature même de ces productions et de ces marchés que de devoir rester libres et aléatoires,  encadrés bien sûr par des règles finement adaptées. La suppression des trois R (rabais, remises et ristournes), fait partie de ces règles qui peuvent améliorer la qualité de la relation commerciale des opérateurs entre eux pour ces produits périssables. La contractualisation obligatoire telle qu'elle est prévue, non. 

 

Je suppose que Coluche dans de telles circonstances aurait dit que si dans un contrat on ne peut rien dire sur les prix, pas grand-chose sur les volumes et en conséquence encore moins dans ces conditions sur la durée de la relation commerciale, il est urgent de fermer sa gueule. Décidemment sa franchise nous manque encore…

 

Cette contractualisation obligatoire sera donc sans contenu novateur et alourdira inutilement les coûts de fonctionnement des entreprises et de l’administration française. Elle constitue un catastrophique exemple de plus de la perte de compétitivité de la France. Dès lors, il y a nécessité absolue de supprimer tout simplement cette obligation absurde instituée par la loi, tout autant que le décret du 31 décembre 2010. C’est une décision à prendre d’urgence si l’on se préoccupe véritablement de compétitivité.

 

J’insiste là-dessus, parce qu’en haut lieu on continue trop souvent de penser que la compétitivité c’est l’affaire des seules entreprises. Or nous avons là un exemple terrifiant d’un frein national à la compétitivité que les instances dirigeantes syndicales et politiques ne semblent pas capables d’identifier. Est-ce que l’on se rend bien compte de l’énergie dépensée par les représentants syndicaux, les élus, le gouvernement pour produire une telle loi ? Est-ce qu’il est possible d’évaluer la charge inutile imposée à cette activité économique tout autant que dans l’administration, qui va ainsi creuser un peu plus nos déficits en travaillant inutilement, mais vraiment dur, pour produire, contre son gré, de l’inutile et du nuisible ? La France n’a plus les moyens de se tromper si grossièrement. Nous avons vraiment là un cas d’école de ce que l’on peut faire de plus monstrueux et d’absurde dans notre pays en matière d’économie dirigée. Cela part sans doute d’une bonne intention de la part de professionnels. On fait malheureusement ensuite négocier des cadors de la trempe du fumiste fumeux dont je vous ai parlé. Le pouvoir politique à la recherche de solutions pour un secteur en crise accède à la demande des professionnels (mais pas de moi puisqu’on ne m’écoute sur ces sujets qu’avec des yeux hagards qui me font douter quelquefois de mon QI minimum) avec d’autant plus de facilité que cela ressemble à la pierre philosophale de la gratuité créatrice de richesse et de partage de la valeur ajoutée, comme on en rêve chez les élites quand elles ont séché les cours d’économie.

 

J’ai participé hier à la réunion organisée par Jean François Copé pour annoncer aux cadres du parti le plan d’actions qu’il a défini avec Hervé Novelli et Marc Philippe Daubresse. Un grand moment d’intelligence, de pragmatisme et de simplicité. J’apprécie surtout qu’il invite à débattre, qu’aucun sujet ne doit être tabou et qu’il faut s’interdire de brider la parole d’en bas. Que c’est par le débat que s’élaborent les propositions intelligentes et novatrices. Ce parti pris me plait et j'en use.

 

J’ai la conviction vous l’avez compris que cet élément de la loi doit être supprimé et je m’autorise à le dire…avec peu de chances d’être entendu, je sais. D’autant plus que le ministre a insisté à Dax pour dire, martial, qu’il n’accorderait aucun délai supplémentaire à l’obligation de proposer un contrat aux producteurs. Il est très loin, il me semble, de percevoir ce que je cherche à expliquer pour l'aider dans son action politique que je soutiens le plus souvent avec force.

 

Pris d’un rhume énorme, j’étais totalement aphone hier. Xavier m’a pourtant adressé un sms en début d’après midi pour me dire que Bruno Le Maire était justement à son bureau au premier étage, quand j’étais au second, et que je pouvais donc le voir. Sans voix et pour prendre le contrepied de ce qui lui semble bien acquis et évident, ce n’était même pas la peine d’essayer. Une très belle occasion de manquée… 

 

Je n’étais pas présent non plus lorsqu’il a prononcé son discours de clôture à Dax (il est visible sur internet), ayant du partir à l’heure du déjeuner pour me joindre à l’équipe d’Elisabeth Morin qui avait obtenu une visite de Laurent Wauquiez, le ministre chargé des affaires européennes, dans une distillerie à Cognac, ainsi qu’une rencontre au BNIC. Au passage, le candidat Jean Hubert a pu profiter de son soutien lors d’une courte rencontre très sympathique, au milieu de quelques militants et sympathisants, au Cougna-Bar, place François premier.

 

La suppression des droits de plantation pour laquelle le ministre Wauquiez est sollicité, entre autres sujets, est un dossier qui nous préoccupe vivement dans la région délimitée du Cognac. Je vais travailler plus intensément le dossier que je ne l'ai fait à ce jour. Nous en reparlerons.    

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À propos

Je suis arboriculteur, viticulteur et maire de Reignac. Mais aussi Président de l'Association Nationale Pommes Poires, membre de WAPA (World Apple and Pear Association) et secrétaire général d'Interfel.
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P
<br /> <br /> dis-donc mon Daniel,star de la pomme nationale ou tout va bien...<br /> <br /> <br /> Dans le contexte ,Tirer sur l'ambulance c'est facile(même sans lunettes).... ;prendre ceux qui essaient modestement d'oeuvrer, pour des gros glands rougeoyantsde l'ex bloc de l'Est.....c'est pas<br /> très constructif!!; t'as du oublier tes cours de catéchèse...a moins que ça aussi soit des conneries d'innocents de bas étages.<br /> <br /> <br /> Désolé...de ne pas être a ta hauteur.... ,que ta vision de grand réformateur d'élite montre son efficience au plus grand nombre!!!nos JA te remercierons<br /> <br /> <br /> Bien a Toi<br /> <br /> <br /> Pascal<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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